et la paix régna du Cap au Zambèze durant une vingtaine d’années. Malheureusement, dans ce quart de siècle, l’esprit public en Angleterre changea de fond en comble. On rejeta tout motif d’ordre moral. Les mobiles d’un matérialisme égoïste et usurpateur prirent librement le dessus, et quoique, liée par des traités solennels, l’Angleterre ne pût passer outre sans violation ouverte de la foi jurée, on n’hésita pas. Les diamans de Kimberley brillaient, dans l’Etat libre, d’un éclat trop séduisant, et les mines d’or du Rand devenaient le malheur du Transvaal[1].
En 1867, le south-african, diamant devenu célèbre, fut vendu pour 2 500 livres sterling. Un chef cafre, du nom de Waterboer, soutenu par M. Arnot, éleva des prétentions sur le terrain où ces pierres précieuses avaient été trouvées. Et, dès 1871, M. Burkley annexait, en flagrante violation du traité de Bloemfontein, tout le riche district de Kimberley. Le 13 juillet 1876, le président Brandt se vit forcé de signer, à Londres, une convention par laquelle il devait céder à raison de 90 000 livres sterling un territoire dont le produit annuel on diamans a monté jusqu’à 4 millions de livres. Puis, à cette première et cynique violation des droits dûment acquis, l’Angleterre ajouta, le 12 avril 1877, une rupture plus scandaleuse encore de ses engagemens par l’annexion pure et simple du Transvaal tout entier. Shepstone, à la tête d’une petite armée, entra à Pretoria ; pour sauver les apparences, il consulta quelques marchands et employés, et, se tenant pour satisfait de ce plébiscite frauduleux, il anéantit d’un seul coup le fruit de tous les sacrifices que les Boers avaient consommés pour conquérir leur indépendance. Une fois encore le sort des indigènes servait de prétexte ; mais le hasard a de ces jeux : deux ans plus tard, les Anglais eux-mêmes en vinrent aux prises avec eux, et en massacrèrent 10 000, hommes, femmes et enfans[2].
Cependant, confondus d’une telle impudence, les Boers ne purent songer à résister. Ils crurent avoir affaire à un coup d’audace du gouverneur du Cap, et, persistant dans la respectueuse confiance qu’ils avaient en la reine Victoria, ils se décidèrent à envoyer en 1877 une députation à Londres. Quelle déception les y attendait ! L’accueil qu’on leur fit fut plus que froid. Une seconde