Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 157.djvu/69

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

politiques qui combineront leurs votes en vue de faire échouer les élémens les plus importans de la liste. Pour obvier à cet abus, on a proposé, comme moyen terme, d’abandonner aux parrains le soin de régler l’ordre des candidats, en réservant aux électeurs le droit de renverser cet ordre par leurs votes de préférence.

Un autre point controversé, c’est s’il faut ou non maintenir à l’électeur le droit de distribuer ses suffrages entre des candidats inscrits sur des listes différentes. On fait valoir, pour l’affirmative, que la loi ne peut pas contraindre un citoyen à se ranger dans un parti politique et que tout électeur doit avoir la faculté de choisir ses mandataires indépendamment de leurs opinions. En sens contraire, on allègue que l’élection est un choix entre des partis ; que, si des candidats entendent se solidariser, l’électeur n’a aucun moyen de s’y opposer ; que sa liberté, du reste, est suffisamment sauvegardée par le droit de présenter des listes différemment composées ou même des candidatures isolées. La loi, que vient de voter la Chambre belge, tranche la question en n’accordant à chaque électeur que la faculté de voter pour une liste et éventuellement pour un candidat déterminé de cette liste ; elle est partie du principe que nul n’a droit à plus d’un mandataire, et qu’en votant pour un candidat qui a accepté de figurer sur une liste, on vote implicitement pour cette liste elle-même. Quelles que soient les solutions qu’on adopte sur ces différens points, elles n’affectent en rien le principe même de la représentation proportionnelle. Si j’en ai parlé ici, c’est surtout afin de montrer que la réforme est entrée dans sa période d’application pratique et qu’elle ne s’y est heurtée à aucun obstacle dirimant.


V

La conclusion qui semble se dégager de cette étude, c’est que la représentation proportionnelle, sans être une panacée, — il n’y a pas de panacée en politique plus qu’en médecine, — rectifiera le mécanisme du gouvernement parlementaire, en assurant à chaque groupe assez nombreux d’électeurs une part de mandats en rapport avec sa force numérique et en supprimant la fiction qui, sous le régime majoritaire, fait des élus les mandataires de la minorité aussi bien que de la majorité. Il serait téméraire de s’imaginer que, du jour au lendemain, elle fera régner, dans les