les ressources financières et les forces dont nous pouvons disposer.
Avec son engouement pour les torpilleurs, les croiseurs et les bateaux-canons, l’école de la jeune marine a exercé sur les esprits parlementaires une action funeste. Les hommes de guerre sensés n’ont pas fait, pour ramener l’opinion, les déclarations nettes, publiques, sans réserves, qui s’imposaient de leur part, en toute occasion, dans l’intérêt de la France. Ils ont plaisanté la poussière maritime, et les croiseurs parlementaires, mal protégés, mal bâtis, incapables de tirer dès que la mer est un peu grosse. Ils ont dit, dans des conversations privées, qu’au retour de Kiel le Dupuy-de-Lôme, tant vanté, roulait tellement qu’il eût été incapable d’envoyer un seul coup au Hoche, par lequel il eût été criblé de projectiles tirés presque aussi sûrement que d’une batterie de terre. Mais ils n’ont pas tenu ce langage avec assez d’autorité et publiquement, comme ils l’auraient dû.
Il est temps, pour eux, d’affirmer, coûte que coûte, ce qu’ils pensent : le navire de combat est le cuirassé ; sa ligne de flottaison complète et son artillerie de gros calibre sont à l’abri des coups les plus puissans de l’ennemi ; il est surtout doué d’une grande stabilité de plate-forme, de la plus grande facilité d’évolution, de façon à multiplier l’action rapide de sa grosse artillerie dans la période décisive du combat.
Nous pouvons maintenant dire brièvement quel programme doit être la conséquence des idées et des faits que nous avons exposés. En voici les données essentielles :
Des cuirassés puissamment et simplement armés, très manœuvrables, pour lesquels la vitesse et le rayon d’action sont relativement secondaires, attendu qu’ils ne doivent pas s’éloigner des mers qui baignent les côtes de France, celles de l’Angleterre et de l’Afrique septentrionale ;
Des croiseurs peu protégés, peu armés, destinés à courir sur les mêmes mers, et ne devant pas combattre en ligne, ayant les vitesses maxima, des rayons d’action modérés, de façon à faire leur métier qui est celui d’éclaireurs, à être, en un mot, la cavalerie légère de la flotte, et non à faire des raids à travers l’Océan contre les navires du commerce ;
Des torpilleurs pour défendre les côtes, en liant leur action à celle de nos batteries de côte et de la défense fixe ;