l’organisation corporative est définitivement reconstituée dans les trois nations les plus industrielles de l’Europe, en Angleterre d’abord, puis en Allemagne et en Autriche ; et elle s’impose de plus en plus en Belgique et en France. En présence de la continuité et de la force de ce courant, on peut affirmer qu’il ne s’agit pas là d’un simple remous, d’une réaction aveugle, mais que c’est bien la reprise de la marche en avant dans le sens indiqué par l’histoire et par la tradition.
C’est ce mouvement que nous voudrions étudier ici dans ses récentes manifestations, pour montrer comment le bon sens du peuple l’a ramené plus sûrement que l’étude du passé aux principes qui sont la base de toute société, et pour prouver que, dans l’ordre économique comme dans l’ordre religieux et dans l’ordre politique, rien de complet et de durable ne peut être fait sans une autorité assez forte pour triompher des résistances et maîtriser les appétits, mais dirigée et contenue par la tradition.
En étudiant le mouvement corporatif en Europe, nous ne nous proposons pas de soutenir une thèse philosophique et de démontrer la supériorité de tel ou tel système. Nous croyons que la science sociale consiste dans l’observation et l’analyse des phénomènes économiques, et, avant de discuter la légitimité et les avantages de l’organisation corporative, il nous semble nécessaire d’en faire connaître les manifestations dans le monde moderne ; de constater la généralité et la force du mouvement corporatif ; de montrer ce qu’il a déjà produit, quels moyens il met en œuvre, quels objectifs il se propose, quels résultats il a obtenus.
En effet, alors même qu’on parviendrait à établir la supériorité de cette organisation au point de vue théorique, il resterait toujours une objection pratique, dont on ne peut méconnaître la portée. C’est que ce régime a fait son temps, qu’il a pris fin en même temps que l’organisation sociale qui lui avait donné naissance, et que son moule trop étroit est inconciliable avec les besoins et les exigences de l’industrie moderne. La meilleure réponse à cette objection consiste à faire l’historique de la reconstitution de la corporation dans les pays anglo-saxons et chez les peuples de race germanique, et à prouver par des documens législatifs, des statistiques, des chiffres et des faits, que cette