son ami Rubens, il a horreur de l’emphase et il reprend assez vivement à ce sujet la subtilité un peu précieuse d’un de ses voisins, le prieur de Roumoules. A propos d’un anagrammiste fort habile, et par conséquent très apprécié à cette époque où ces sortes d’exercices trouvaient de nombreux admirateurs, tout en envoyant à son ami Camden des échantillons réclamés par celui-ci du savoir-faire de ce personnage, il trouve qu’il est « dommage que son labeur ne soit pas en chose plus utile, car il y réussit à souhait. »
Dans l’amour que Peiresc montre pour les arts, il manifeste des préoccupations semblables. Sans doute, il met au-dessus de tout Rubens, son génie, sa prodigieuse fécondité. Mais, tout en le défendant contre plusieurs de ses détracteurs, les critiques que, sur sa demande, il lui soumet, non sans quelque timidité, portent assez justement sur des incorrections, sur des exagérations de formes. Ayant reçu de lui une copie peinte du camée de Tibère, il trouve « qu’après avoir vu la force qui paraît en cette peinture, tout le reste semble si plat et si niais que c’est pitié. » Quant à lui, il exhale avec chaleur son regret de ne pas savoir dessiner et il voudrait « racheter de deux doigts de sa main gauche l’ignorance de sa droite sur cet art. » En réalité, la façon de dessiner qu’il ambitionnerait est conforme aux besoins de précision de son esprit. Il n’aime pas les à-peu-près et sent, au contraire, tout le profit que la science pourrait tirer d’images rigoureusement fidèles. « En matière de choses naturelles, dit-il, les dessins ne sont considérables que selon qu’elles sont bien exactement représentées. » À ce titre, il faisait le plus grand cas de Claude Mellan, le célèbre graveur, et goûtait fort la scrupuleuse correction de son dessin. A son retour de Rome, où il avait séjourné une douzaine d’années et beaucoup travaillé pour Peiresc, Mellan s’était décidé à repasser par Belgentier où son hôte le gardait plus de quinze jours. Il était ravi de son talent, de sa belle humeur, et lui faisait faire son portrait ainsi que des dessins de toute sorte. « C’est un ange, écrit-il à Gassendi (28 août 1636), le plus traitable et le plus affectueux du monde. » Bien d’autres artistes reçoivent aussi des encouragemens de Peiresc. Il cherche par tous les moyens possibles à rendre service au peintre flamand de Vries, pendant son séjour à Paris ; il vante le charme de sa conversation et le recommande avec instance à ses amis, « comme travaillant si noblement qu’après feu M. Pourbus, il ne voit personne qui l’égale. »