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Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 158.djvu/478

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intervention aurait pu jeter dans la balance un poids décisif ? On a cru d’abord qu’ils hésitaient et qu’ils voulaient, avant de prendre une résolution, se rendre compte des forces respectives des deux armées : mais alors, pourquoi ne se sont-ils pas soulevés au moment où la fortune semblait sourire aux Boers ? Pourquoi ont-ils attendu pour le faire qu’elle parût se prononcer contre eux ? N’est-ce pas avant l’arrivée des renforts britanniques qu’ils auraient pu se ranger du côté des Boers le plus utilement pour ces derniers, et pour la cause de l’indépendance de l’Afrique australe dont ils étaient les vaillans champions ? À toutes ces questions, il est difficile de faire des réponses satisfaisantes. Quelques personnes se demandent si les Afrikanders du Sud n’ont pas voulu attendre que les forces anglaises fussent en totalité engagées au Nord pour menacer leurs communications avec la base de leurs opérations, qui est le Cap : peut-être ont-elles raison. Les journaux anglais présentent, bien entendu, les choses autrement, et s’efforcent d’atténuer le danger, sans aller toutefois jusqu’à le nier complètement. Le Times ne croit pas que les Afrikanders se soulèvent en masse, ou du moins qu’ils le fassent bien sérieusement, au moment même où la guerre prend une meilleure tournure pour les Anglais. Il juge plutôt qu’il n’y a là qu’une manifestation morale, et en quelque sorte diplomatique, en vue d’amener le gouvernement impérial à conclure la paix plus vite et dans des conditions plus favorables au Transvaal. Nous donnons ce raisonnement pour ce qu’il vaut : il n’a pas généralement paru bien convaincant. La vérité est que nous ignorons pourquoi les Afrikanders ont choisi l’heure actuelle pour se soulever ; on peut faire à cet égard toutes les hypothèses qu’on voudra ; mais, en fait, ils se soulèvent, et, s’il n’y a pas là, dès aujourd’hui, un péril bien redoutable pour les armées anglaises, il y a du moins une gêne et un embarras. Qui sait si les inquiétudes qui en résultent ne sont pas pour quelque chose dans l’espèce d’immobilité où est resté lord Roberts après avoir fait le général Kronje prisonnier, et surtout dans celle de lord Kitchener ? En somme, la situation des Anglais, quoiqu’elle soit notablement améliorée, n’est pas ce qu’on aurait pu croire d’après les premières explosions de joie qui se sont produites à Londres. Tout ce qu’on peut dire, c’est que le prestige britannique, après l’éclipsé presque totale qu’il avait subi, a commencé à reprendre quelque éclat.

L’occasion serait bonne pour adopter une politique de modération et pour faire la paix. On parle beaucoup de la paix depuis quelques jours. Les nouvelles les plus diverses circulent à ce sujet. On assure,