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LA FRANCE


ET


LE MOUVEMENT ANTl-ESCLAVAGISTE


AU XIXe SIÈCLE


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Le cardinal Lavigerie, en entreprenant l’œuvre de la rédemption des esclaves, ne faisait que reprendre une glorieuse tradition, catholique et française, fondée par les Pères de la Mercy, les Trinitaires et les Lazaristes : la mort l’empêcha d’accomplir le dessein conçu par son grand cœur et qui avait reçu la consécration de l’Europe à la conférence de Bruxelles (1890). La traite, ce trafic de « marchandise humaine, » a été abolie par le concert des nations chrétiennes et même par deux puissances musulmanes : l’empire Ottoman et le royaume de Perse. Mais l’esclavage subsiste encore dans ces derniers pays, en Égypte, à Tripoli, au Maroc, au Siam, au Laos, à l’intérieur de l’Afrique et dans les possessions continentales du sultan de Zanzibar. Bien plus, la servitude a revêtu, depuis 1835-36, une forme nouvelle, celle du travail par contrat des coolies (coolies indentured labour), imaginer d’abord par les planteurs de Maurice et de la Guyane anglaise et, depuis, imitée par plusieurs de nos colonies, et qui est d’autant plus dangereuse qu’elle se présente sous le masque de la liberté. Les apologistes de ce système d’enrôlement de travailleurs immigrans et prétendus libres font valoir les mêmes argumens économiques que les partisans de l’esclavage aux Antilles, il y a soixante ans ou plus récemment en Amérique, lors de la guerre de Séces-