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posé de trois délégués de chacun des comités anti-esclavagistes de France, Allemagne, Angleterre, Autriche, Belgique, Espagne, Italie.

L'archevêque de Carthage ouvrit la première séance à Saint-Sulpice, le 21 septembre 1890 au soir, devant un auditoire au premier rang duquel on remarquait Mgr  Livinhac, missionnaire, arrivé le matin même de la région des grands Lacs, avec quatre indigènes chrétiens ; Mgr  Fabre, archevêque de Montréal ; le prince Rospigliosi, président du comité de Rome ; le vénérable Charles Allen, secrétaire général de l’Anti-slavery-society, Jules Simon, M. Georges Picot, et toute l’élite des philanthropes français. Il électrisa ses auditeurs et unit tous les cœurs dans une pensée, par sa parole aussi éloquente que généreuse. Les délégués de tout pays et de toute confession n'eurent pas de peine, après cette entrée en matière, à se mettre d'accord sur les conclusions dont voici la substance. Après avoir envoyé aux souverains signataires de l'Acte de Bruxelles le témoignage de leur gratitude pour l'œuvre accomplie, ils résolurent : 1o délaisser aux comités nationaux leur autonomie pour provoquer le concours de toutes les bonnes volontés ; 2o de recommander surtout l'emploi des moyens pacifiques, l'action morale des missionnaires ; 3o de signaler aux puissances le danger que faisait courir à la civilisation le développement de certaines sectes musulmanes et 4o les abus dans le recrutement des travailleurs libres, afin de sauvegarder la liberté des noirs. Enfin le Congrès exprimait au Saint-Père, qui avait si glorieusement revendiqué en maintes circonstances, entre autres, dans sa lettre aux évèques du Brésil, la liberté des enfans noirs de la grande famille humaine, le vœu qu'il autorisât une quête annuelle pour le besoin de l'œuvre. Léon XIII, qui avait déjà si généreusement encouragé les premières démarches du cardinal Lavigerie, exauça ce vœu en permettant que, dans tous les pays catholiques, la quête de l'Épiphanie fût consacrée à la suppression de la traite (I).

Après le cardinal Lavigerie et les gouverneurs civils et militaires à qui l’on doit la fondation des villages de liberté, les deux Français, qui ont remporté le plus de succès dans la lutte contre la traite et l'esclavage sont MM. Lagarde et Laroche. Le premier, depuis quinze années qu'il commande à Ubock, a déployé autant (1) Cette quête rapporta environ 300 000 francs par an.