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Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 160.djvu/628

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chaleur du soleil est d’ailleurs ennemie de la ligne droite, qui laisse les rayons frapper toujours le même endroit, tandis que l’indigène se tourne et se détourne sous la brûlure torride. Le cheval lui-même, après le piéton, suit exactement les mêmes méandres ; et, tant que les larges chemins ne verront pas rouler des services de voitures, l’étroit sentier de l’indigène y festonnera son passage.

Les longues routes planes, qu’il faut suivre, au pas, derrière un convoi de coolies, qu’on ne veut pas laisser en arrière de peur de le voir s’attarder davantage, sont terribles sous une chaleur de 50 degrés qui dispose au sommeil. Je me suis vue céder à l’engourdissement dix fois en une heure ; et il m’est arrivé de me réveiller dans la crinière de mon étalon. Je dormais encore, lorsque tout à coup ma monture fît un faux pas, sans compromettre trop gravement mon équilibre ; mais le bruit fit sauter, à 4 mètres de moi, dans les hautes herbes un bizarre animal, ressemblant à un kangourou, dont les pieds nus de ma caravane n’avaient pas dérangé la sieste. C’était une grosse gerboise, — une müm, — qui bondit comme son similaire australien.

Les invasions siamoises ont laissé dans ce pays quelques empreintes. Comme au Siam, le sampot de couleur claire est réservé aux jeunes filles et aux jeunes ménages, souvent jusqu’à ce que la femme devienne mère. Le sampot du mari est tissé par la fiancée ou par la femme aux premiers jours de l’union. Celui de la femme est donné par le mari. Une jeune fille qui veut attirer l’attention d’un homme lui apporte des fleurs, ce qui veut dire : vous me plaisez. L’homme, en acceptant les fleurs, fait acte d’acquiescement, ou au moins de remercîment. Et, après les fleurs elle apportera la cigarette tout allumée : c’est un acte de vasselage, de soumission, accompli d’ordinaire par le serviteur.

Les animaux les plus respectés sont le paon, la perruche et le singe dormeur : joli singe noir, aux longs bras et à la tête blanche, ou singe blanc, à la tête et aux pattes noires.

Il existe aussi dans ces régions quelques Khas insoumis qu’il serait peut-être plus habile de séduire que de combattre. Ils ont d’ailleurs des moyens de défense ingénieux et terribles. Ils lancent fort adroitement, avec leurs arbalètes, des flèches de bambou, qu’ils empoisonnent quand ils les destinent à leurs ennemis plutôt qu’au gibier. Aussi, la blessure causée par le bambou est-elle vénéneuse, et se guérit-elle difficilement. Ils