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fleuri. Il dictait lui-même toutes ses lettres, ne disait pas un mot de plus qu’il n’était nécessaire. » Donc Basile II avait simplement le défaut de dédaigner la diffusion pompeuse chère aux lettrés de Byzance comme à la chancellerie chinoise. Empereur, il affectait l’imperatoria brevitas. Après tout, ce n’était pas avec des subtilités de grammairiens que l’hégémonie de la race grecque pouvait être préservée. Le péché mignon de l’hellénisme, c’est d’avoir été trop beau parleur et trop brillant disputeur ; en 1453, c’est parce que le dernier Paléologue ne put faire prévaloir la vertu militaire sur « le bavardage inutile » qu’il ne trouva que cinq mille neuf cent soixante-treize Grecs pour affronter autour de lui le suprême assaut.

La belle miniature du XIe siècle nous présente un empereur à barbe blanche ; c’est que la guerre que Basile II soutint contre les Bulgares, commencée par lui presque à son avènement, ne se termina que quand il eut près de soixante ans. Elle dura donc près d’un demi-siècle. D’ailleurs les batailles bulgares ne sont qu’une partie de l’épopée militaire de l’empereur Basile. Durant tout son règne il lui fallut courir des champs de bataille d’Europe à ceux de l’Asie. Il eut à défendre contre les Allemands et les Arabes de Sicile les dernières provinces que l’empire grec eût gardées en Italie, à lutter sur la Mer-Noire contre les Russes ; il dut livrer bataille à des stratèges usurpateurs entraînant dans leur rébellion les légions romaines d’Anatolie, réduire à l’obéissance les dynastes de l’Arménie, dompter les sauvages tribus du Caucase, qui, en notre siècle, firent tête aux meilleures troupes de Nicolas Ier et d’Alexandre II, tenir en respect le khalife de Bagdad, battre les armées du sultan d’Egypte, assiéger les places fortes des émirs syriens. Telle campagne de Basile qui en quelques semaines l’amenait, avec quarante mille fantassins montés sur des mules, du fond de la Bulgarie sous les murailles d’Alep, mérite d’être étudiée par les hommes du métier. Qui sait si, quelque jour, pour tel plan de campagne qui aurait pour point de départ les frontières russes et pour objectif celles de l’Egypte, l’audacieux raid du printemps de 995 ne deviendra pas d’actualité ?


VIII

De tous les exploits de Basile II nous ne retiendrons ici que ses guerres contre les Bulgares. La lutte entre les deux races