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guerre électorale y est plus acharnée et que les coups échangés au cours d’une lutte aussi prolongée laissent de cruelles meurtrissures.

D’autre part l’esprit de discipline fait généralement taire toutes les dissidences qui dans un même camp politique pourraient compromettre la victoire du drapeau, et il n’est pas rare de voir un candidat présidentiel écarté par une convention faire campagne pour le concurrent qui lui a été préféré. Tel a été en 1896 le cas de M. Reed, président de la Chambre des représentans, compétiteur de M. Mac-Kinley dans la Convention de Saint-Louis, et qui, au lendemain de sa défaite, a mis au service de son heureux rival son talent de parole et sa grande respectabilité. Un autre exemple de cette abdication et de ce sacrifice de toute susceptibilité personnelle au profit d’un programme commun a été donné à la même époque par l’ex-président Benjamin Harrison, dont le nom, avait été tout d’abord mis en avant pour une nouvelle présidence et qui, après avoir décliné les propositions qui lui étaient faites, s’est enrôlé sous la bannière du candidat choisi par son parti et a plaidé éloquemment sa cause dans les réunions publiques.

Nous touchons au terme de cette odyssée électorale. Le résultat définitif du scrutin a été enfin proclamé par le président du Sénat. Le futur président des Etats-Unis néanmoins n’est pas encore admis à l’exercice du pouvoir et un nouveau délai de deux mois va s’écouler avant son entrée en fonctions. Ce n’est que le 4 mars en effet, comme on sait, qu’il franchira le seuil de la Maison Blanche.

Pour le parti vainqueur, l’heure est enfin venue de jouir de sa victoire. En attendant qu’il puisse en recueillir des fruits plus substantiels, nous allons le voir, le jour de l’inauguration de la nouvelle présidence, officiellement associé au triomphe de son candidat. À ce point de vue la cérémonie du 4 mars, qui n’a d’analogue dans aucun autre pays, est particulièrement instructive. Elle comprend deux parties distinctes, d’un caractère tout différent : la prestation du serment qui a lieu sur les marches du Capitole et la « parade » (c’est le nom consacré) qui la suit presque aussitôt et qui a pour théâtre la principale avenue de Washington.

La première met littéralement face à face l’élu de la nation et la nation elle-même. C’est devant le peuple qu’il jure fidélité à