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sollicitude administrative résulte une augmentation de natalité dans les contrôles de l’armée et les officiers mettent de l’amour-propre à voir leurs effectifs s’augmenter promptement. Ils se plaignent bien un peu d’être trop désarmés vis-à-vis du personnel féminin et ils pestent contre ces indisciplinées qui, sentant leur impunité, leur font bien des misères. Il est difficile assurément d’armer les chefs du droit d’infliger 25 ou 30 coups de chicote à ces dames, comme ils peuvent impunément le faire à leurs maris, mais il est excessif aussi de devoir subir les vexations de ces diablesses, quand elles se sont mis dans la tête d’« embêter le commandant. » J’ai assisté un jour, sur le quai de Boma, à l’arrivée d’un peloton de soldats envoyés du district de l’Equateur ; et c’était un gentil spectacle de voir, au débarquer, les militaires s’aligner consciencieusement pour prendre le chemin du camp, tandis qu’à distance un groupe de femmes rieuses et, ma foi, fort jolies, bavardaient entre elles en attendant que le son du clairon leur permît d’emboîter le pas à leurs époux pour prendre, avec eux, leurs billets de logement.

L’effectif officiel de la force publique est aujourd’hui d’environ 16 000 hommes, fournis par un contingent annuel de 1 200 miliciens. Ce chiffre s’est élevé déjà à 25 000 hommes, et il serait aisé de le porter au double, voire au triple. Car la condition de combattant est fort prisée parmi ces tribus guerrières et l’on pourrait, acceptant des volontaires, en accroître presque indéfiniment le nombre. Le service des miliciens est de sept ans et de cinq années facultatives dans la réserve ; ils se recrutent par district et les chefs de village sont tenus, une fois pour toutes, de fournir chacun la quantité d’hommes déterminée. Non seulement guerriers, ces soldats sont encore cultivateurs ; dans chaque poste, instruction et travail marchent de front. Plantations, maisons, installations de tous genres sont le plus souvent l’œuvre de la troupe indigène dirigée par ses chefs blancs. Dans les petites stations disséminées sur tout le territoire, chaque soldat devient presque un agent de l’État, soit en surveillant, soit en portant un ordre parfois à plusieurs jours de marche, soit en recrutant des travailleurs ou en rappelant le tribut à payer, le ravitaillement à fournir. Ces missions isolées ne sont pas sans péril, mais le plus souvent le fait seul de porter l’uniforme et surtout le fusil de l’État inspire le respect et sert de passeport.

Les cadres des sous-officiers et des caporaux pour commander