Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 162.djvu/392

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La désillusion que confessait ici M. Talmeyr, nous l’avons trouvée comme lui à la section des Colonies françaises. Le grand effort de l’expansion coloniale caractérise et ennoblit l’histoire extérieure de la France sous la troisième République. L’héroïsme de la race se dépense actuellement dans ces nouveaux empires ; nous fondons sur leur développement nos meilleures espérances de grandeur et de fortune. Il fallait leur faire la part très large dans l’Exposition jubilaire ; il fallait renseigner abondamment notre peuple sur ses acquisitions récentes et trop peu connues. — Eh quoi ! C’est cela, notre immense domaine colonial ? Ce chaos inextricable ! L’Asie et l’Afrique, l’Amérique et l’Océanie, les blancs, les noirs, les jaunes s’enchevêtrent dans ce pêle-mêle de pagodes et de paillotes, tassées à l’étroit sur la pente du Trocadéro. Il faut être de la partie, et bon géographe, pour se reconnaître dans ce dédale. Le profane s’y perd, comme il ferait dans les découpages d’une de ces cartes de géographie dont on brouille les fragmens avant de les donner aux enfans, afin qu’ils s’exercent à les recomposer. Et si peu de population devant ces cases, à peine quelques rares figurans ! En 1889, on avait amené bon nombre de nègres et d’Annamites à l’Esplanade des Invalides. Rappelez-vous la curiosité enorgueillie de nos Parisiens, quand ils contemplaient leurs « sujets, » le petit bataillon jaune qui manœuvrait si gentiment, la tribu des Pahouins qui piroguaient sur la rivière… — Le pavillon de Madagascar, plus à l’aise en dehors de l’enceinte, donne seul des idées nettes et des renseignemens suffisans sur la région qu’il nous invite à étudier. — L’exiguïté de l’emplacement et le désordre du plan originel ont paralysé les mains habiles auxquelles fut confiée trop tard la défense de nos colonies. On avait reculé devant la vraie solution : une exposition coloniale bien ordonnée, très peuplée, largement espacée dans le parc de Saint-Cloud, sur le modèle de cette instructive représentation du Congo belge que le roi Léopold nous faisait naguère admirer dans le parc de Tervueren. — Nous n’avons pas su coloniser Saint-Cloud. Les marchands de vin avaient mis leur veto, paraît-il. Périssent les colonies plutôt que le mastroquet électoral !

On n’attend pas que nous revenions sur les questions d’art. Elles ont été traitées à cette place avec une abondance et une justesse d’aperçus qui ne laissent plus rien à dire. Accablé par le cauchemar de certains palais, notre érudit collaborateur n’a pas