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soumis à cette condition absolue que nos défenses soient telles qu’aucun incident ne puisse se produire au-delà de nos frontières, et mettre en péril notre sécurité. »

Nous livrons ces paroles aux méditations de nos compatriotes, comme lord Salisbury les a livrées aux méditations des siens. Elles peuvent profiter aux uns aussi bien qu’aux autres. Que voyons-nous aujourd’hui, quand nous tournons les yeux sur l’Angleterre ? Une grande et puissante nation, chez laquelle les circonstances viennent de réveiller, sous le nom d’impérialisme, un sentiment que nous n’avons pas en ce moment à qualifier au point de vue moral, mais qui, au point de vue matériel, est doué d’une effrayante énergie. Et que dit à cette grande nation son premier ministre, connu pour être un des hommes les plus modérés, les mieux pondérés du pays ? Qu’il faut armer, armer toujours davantage, chercher des sympathies au dehors, exalter l’impérialisme des autres afin d’y trouver concours et appui : et il tend la main à l’impérialisme américain après l’avoir tendue à l’impérialisme allemand. Il prêche l’unité morale de tous les enfans de l’Angleterre dans une même pensée défensive, à laquelle il faudrait changer peu de chose pour qu’elle devînt agressive.

Et maintenant, tournons les yeux sur nous et sur notre gouvernement. Nous voyons une nation divisée et un gouvernement qui cherche à la diviser encore davantage, qui fomente en elle les querelles de parti, les querelles de conscience, les querelles sociales, et qui prépare des lois pour loi fournir des armes nouvelles, propres à soutenir ces luttes intestines. Nous voyons un parlement et un ministère désemparés, les institutions militaires ébranlées, tous les esprits livrés à la confusion et à la violence.

Comparez et concluez.


FRANCIS CHARMES.

Le Directeur-gérant, F. BRUNETIERE.