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Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 162.djvu/538

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pratiques religieuses, et une protection efficace sera donnée aux missionnaires qui se rendront pacifiquement dans l’intérieur du pays, munis des passeports réguliers dont il est parlé dans l’article 8. Aucune entrave ne sera apportée par les autorités de l’empire chinois au droit qui est reconnu à tout individu, en Chine, d’embrasser, s’il le veut, le christianisme, et d’en suivre les pratiques sans être passible d’aucune peine, infligée pour ce fait. Tout ce qui a été précédemment écrit, proclamé ou publié en Chine, par ordre du gouvernement, contre le culte chrétien, est complètement abrogé, et reste sans valeur dans toutes les provinces de l’empire. » Ainsi les missionnaires pouvaient aller, n’importe sur quel point de la Chine, exécuter l’ordre du divin Maître : — ite, docete omnes gentes, — et porter la lumière de l’Evangile. La diplomatie française n’avait pas encore fait un effort plus décisif pour initier la Chine à ce droit des nations que le jurisconsulte américain David Dudley Field allait définir en 1875 « un assemblage de règles juridiques faites ou sanctionnées par le christianisme pour les peuples chrétiens[1]. »

Mais rien ne compte en Chine quand on a seulement posé des principes, sans en déduire des conséquences pratiques et des revendications précises. Pénétré de cette vérité, le baron Gros fit insérer dans la convention additionnelle d’octobre 1860 la disposition suivante : « Conformément à l’édit impérial rendu le 20 mars 1846 par l’auguste empereur Tao-Kouang, les établissemens religieux et de bienfaisance qui ont été confisqués aux chrétiens, pendant les persécutions dont ils ont été victimes, seront rendus à leurs propriétaires par l’entremise de Son Excellence le ministre de France en Chine, auquel le gouvernement impérial les fera délivrer avec les cimetières et autres édifices qui en dépendaient. » Tel était du moins le texte français, car, par un singulier hasard, le texte chinois conférait en outre à nos missionnaires le droit de louer et d’acheter des terrains, pour y fonder des églises, dans toute l’étendue de l’empire[2]. Des pourparlers furent entamés et l’on finit par convenir que les missionnaires pourraient acheter des terres au nom des communautés chrétiennes. En outre, on arrêta la formule de passeports spéciaux, qui leur seraient délivrés par la légation de France.

  1. Revue de droit international et de législation comparée, t. VII, p. 659.
  2. Voyez Mayers, Treaties between China and foreign powers, p. 73. Cf. la Revue des Deux Mondes du 15 décembre 1886.