ne nient pas la prépondérance d’une camarilla inquiétante pour nos susceptibilités de race et de tempérament, pour nos traditions intellectuelles, sociales, religieuses. — Soit, mais de quoi vous plaignez-vous ? C’est le jeu de la concurrence, le triomphe légitime et naturel des plus aptes. Si des groupes plus ou moins cosmopolites d’origine ou de tendance ont réussi à prendre la direction de vos services d’Etat, à peser tout au moins sur cette direction, c’est apparemment que vous ne les valez pas : c’est qu’ils ont su former, mieux que vos indigènes, une sélection de sujets plus habiles, plus alertes, plus richement doués d’intelligence et de caractère ; c’est qu’ils l’emportent sur vous par la cohésion, l’application, le savoir-faire actif. Vous êtes le nombre, et vous ne pouvez pas lutter, vaincre loyalement, avec les mêmes armes ! Il est donc juste que vous soyez vaincus et dominés. Vous êtes inférieurs ; les vôtres ont l’estomac débile dont vous parliez tout à l’heure ; et, plus familièrement, ils n’ont pas d’estomac ! — Je suis très sensible à ces argumens, très enclin à reconnaître partout le droit des plus aptes ; et je ne serai pas le dernier à reprocher aux victimes plaintives l’incapacité dont elles font preuve dans la défense de leur patrimoine. Mais la société n’est pas une classe où l’on couronne les meilleurs élèves. Elle est plus complexe, les rapports entre ses parties sont déterminés par des droits d’origines diverses.
Je reconnais la maîtrise d’un Anglais, d’un Allemand, dans certaines industries ; je sais quelles qualités de conduite ou de caractère je pourrais leur envier ; et je leur demanderais volontiers des leçons, dans les parties où ils excellent. Mais ce n’est pas une raison pour que je leur cède mon champ ou ma maison de commerce : s’ils voulaient m’en déposséder, je les prierais d’aller déployer chez eux les qualités que j’admire. En admettant que je leur sois inférieur selon le droit du plus apte, j’ai sur eux le droit supérieur d’être sur ma terre, faite de la cendre de mes morts. — La question est là, et non pas ailleurs, entre le cosmopolite qui réclame les places et fonctions du droit de ses capacités, de son labeur, de sa primauté dans les concours, et le Français qui entend garder ces fonctions en vertu de son droit patrimonial. Je dis le Français. Qui l’était plus et mieux qu’un Guizot, quand ce ferme protestant dirigeait notre politique et poursuivait à l’extérieur les desseins séculaires de la nation très chrétienne ? Qui l’était plus qu’un Cherbuliez, quand cet ami discret et fidèle