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question intéressante, je commençai à l’étudier au point de vue très terre à terre de notre jurisprudence habituelle. Elle se présentait sous une forme qui s’écartait sensiblement de nos traditions, et qui, dès l’abord, attira mon attention.

Le projet de décret que nous envoyait le ministère reconnaissait comme établissement d’utilité publique, non pas l’association maçonnique dans son ensemble, mais seulement le Grand Orient de France, en exceptant formelle meut de la mesure les Loges et les Ateliers de son obédience. Pourquoi cette précaution inusitée ?

Au lieu d’approuver, suivant l’usage, des statuts formant un ensemble complet et destinés à régir ouvertement et définitivement l’œuvre reconnue, le décret choisissait dans la constitution maçonnique quatre articles ; il les détachait des autres et il les isolait pour les approuver. Quant aux autres, il ne les approuvait pas ; il ne les abrogeait pas ; il paraissait en ignorer l’existence !

Ainsi l’autorité accordait son patronage à une société dont elle semblait refuser de connaître l’organisation véritable, la composition et le but.

D’autre part, le Maréchal présentait sa demande tout seul, sans y joindre ces délibérations du conseil d’administration ou de l’assemblée générale que nous avions l’habitude de trouver dans tous nos dossiers et que notre jurisprudence jugeait, indispensables. Seules, en effet, ces délibérations pouvaient nous assurer que l’œuvre en instance désirait véritablement obtenir la faveur sollicitée en son nom, et qu’elle était disposée à se soumettre aux conditions auxquelles cette faveur était légalement subordonnée.

Enfin le dossier ne renfermait aucun renseignement sur la situation financière de la société, aucun élément de statistique, aucun de ces documens nécessaires pour faire connaître l’œuvre, et que nous exigions toujours.

M. Alfred Blanche, conseiller d’Etat, avec qui j’avais eu toujours les relations les plus sympathiques, vint me parler de l’affaire pour me la recommander et me l’expliquer. Il était l’un des trente-trois membres du conseil du Grand Orient, l’un des séides du Maréchal, l’un de ceux qui l’avaient engagé à demander la reconnaissance pour sortir d’embarras. Je lui soumis ces difficultés, qui jusque-là ne portaient que sur des points de pure