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Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 3.djvu/201

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Blijenberg, fut le premier à y repondre. En 1673, le Traité de Théologie fut interdit dans toutes les Provinces-Unies et ne circula plus que sous des titres supposés. Frans Kuyper[1], et, avec plus de décision, Jean Bredenburg[2], essayèrent, selon l’usage, de le défendre sous le couvert d’une réfutation ; ils furent accusés d’être athées, ou sociniens. Contre Spinoza se trouvèrent d’accord les voétiens, les coccéiens, les labadistes, les luthériens, les catholiques, les juifs (Orobio de Castro)[3], et même les exégètes les plus libres, comme Richard Simon[4], et un hôte des « Collégiens » de Rijnsburg, le P. Poiret[5]. — Toutefois, comme il ne pouvait manquer d’arriver en Hollande, une petite secte se forma sous le nom de Spinoza. Il y eut des « spinozistes » comme il y avait des « labadistes » et des « galéniens. » Cette église minuscule eut son ère des persécutions, son âge théologique, ses confessions de foi, ses hérésies, son grand schisme. Les « verschoristes » l’inclinèrent vers le formalisme, les « hattémistes, » dominés par l’influence des femmes, vers un mysticisme illuminé : « Je crois que tout ce que je pense, dis, fais et souffre, ce n’est pas moi qui le fais, mais celui qui est en moi... Je crois qu’il y a en moi une vie cachée, dans laquelle je vivais avant de vivre... Je crois que je suis mort quand je suis né, et que je ressusciterai quand je mourrai[6]. » — Encore aujourd’hui, on trouverait, paraît-il, à Rijnsburg ou à La Haye, quelques douzaines de personnes qui gardent le culte de Spinoza et pensent se faire un privilège de son nom. Ses vrais disciples ne sont pas là.


PAUL-LOUIS COUCHOUD.

  1. Velthuysen (Voy. Van Vlot. in-12, Lettre 42, II, p. 336). Leibniz. Op. theol. Dutens, I, p. 690.
  2. Arcana Atheismi revelata, philosophice el paradoxe refutata. Rotterdam, 1676, tiré en partie d’Henri Morus, Op. philos., I, 563-635.
  3. Enervatio Tr. th.-pol. Rotterd., 1675.
  4. Certamen philosophicum, 1684.
  5. L’Inspiration des Livres sacrés, 1687, omis dans la Bibliographie de Van der Linde.
  6. Fundamenta Atheismi eversa, 1685.