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Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 3.djvu/538

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recevoir le Roi, et le Mercure fait observer « que rattachement pour la maison royale et le zèle qu’ont tous ceux de ce nom pour son service est connu depuis longtemps. »

Les Princes ne pouvaient demeurer moins d’une semaine dans une ville aussi importante que Marseille. Mais le Duc de Bourgogne commençait à trouver que le voyage se prolongeait. Il y avait près de cinq mois qu’il était séparé de la Duchesse de Bourgogne, et, par une lettre qu’il adressait en cours de route à la marquise de Montgon et que nous avons déjà citée, on a pu voir combien cette séparation lui coûtait. Aussi avait-il écrit au Roi pour lui demander la permission de prendre la poste quand il ne serait plus qu’à quelques journées de Versailles, ce qui hâterait son retour. Le Roi le lui permit et, dans une lettre à Beauvilliers, que le soin de sa santé, gravement atteinte, avait forcé d’aller se soigner dans son château de Saint-Aignan, le Duc de Bourgogne en témoignait sa joie. Mais il lui fallut s’arrêter quelques jours à Avignon, dans les États du Pape, où les esprits étaient cependant tellement préparés à une réunion prochaine à la France que le peuple disait nos Princes et qu’à la cathédrale on chanta : Domine salvum fac regem nostrum ; et subir encore l’attente d’un séjour assez prolongé à Lyon qui, ayant autrefois fait fête à la femme, ne pouvait se dispenser, en sa qualité de seconde ville de France, de faire fête au mari. Le Duc de Bourgogne logea dans la même maison dite la Maison Rouge, où avait autrefois logé la Duchesse et qui était située sur la place Bellecour, « l’une des plus belles de l’Europe, qui a six cents pas de long et trois cents de large. » Ainsi qu’à l’entrée de la Duchesse de Bourgogne, les bourgeois de la milice avaient fait la haie sur son passage. « Leurs armes étoient presque toutes damasquinées et dorées. Eux-mêmes étoient magnifiquement vêtus, les uns avec des habits de velours cramoisi, les autres avec du drap d’Angleterre, enrichi de galons et de boutonnières d’or et d’argent. » Mais, tandis que la Duchesse de Bourgogne n’avait guère visité que des églises et des couvens, le Duc de Bourgogne et son frère visitèrent des fabriques « où ils virent fabriquer de belles étoffes, de grands galons d’or, et tirer l’or par des jeunes filles, les unes habillées fort proprement à la Lyonnaise et les autres vestues de noir[1]. » On leur donna aussi

  1. Mercure de mai 1701, p. 159.