Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 3.djvu/553

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de ses stations, le plus souvent à pied, et ayant choisi de préférence les églises les plus pauvres, parce qu’il y laissait d’abondantes aumônes. La Duchesse de Bourgogne en avait fait autant, au milieu d’un grand concours de peuple venu pour la voir. « Elle a soutenu, dit le Mercure, le caractère de grande princesse et de véritable chrétienne avec une sage modestie, et fait paroître ce qu’elle étoit en faisant paroître quelle cherchoit à l’oublier[1]. » Quant au duc de Bourgogne, fuyant l’affluence, il avait fait à Versailles le plus grand nombre de ses soixante stations, « avec une dévotion qui a édifié tout le monde, » ajoute Dangeau[2]. Les dernières avaient eu lieu le 22 avril. Quelques jours auparavant, « le Roi ayant proposé dans son Conseil d’avancer de quelques jours le départ du Duc de Bourgogne et ayant dit les raisons qu’il croyoit devoir l’obliger à faire partir ce prince plus tôt qu’il n’avoit été résolu, » le départ avait été fixé au 25, « M. le duc de Beauvilliers, continue le Mercure, qui savoit l’impatiente ardeur que ce prince avoit depuis longtemps de se distinguer à la tête des troupes de Sa Majesté et de marcher sur les traces du Roy et de M. le Dauphin, eut permission de sortir du Conseil avant qu’il fût fini pour lui annoncer ce qui venoit d’être résolu. Il eut à peine prononcé les premières paroles de ce qu’il avoit à luy dire que ce prince fit paroistre une si grande joie qu’il seroit impossible de l’exprimer. Il courut incontinent ou plutôt il vola chez Mme la Duchesse de Bourgogne pour luy en faire part. On peut dire que la joye de cette princesse fut fort grande, quoy qu’elle fust combattue par sa tendresse que cette nouvelle semble faire redoubler. » L’annonce de ce départ mettait les poètes du temps en verve, et l’un d’eux s’écriait dans des vers que le Mercure publiait :


Vous estes déjà prest et vostre contenance
Est un digne témoin de vostre impatience.
Partez, Prince, partez, et revenez vainqueur.
La gloire vous attend au temple de l’honneur[3]


En même temps qu’il avançait ainsi le départ du Duc de Bourgogne, le Roi avait décidé qu’il partirait en poste, accompagné du seul Saumery et de six aides de camp que le Roi désigna en même temps, ses équipages ne devant le rejoindre que

  1. Mercure de France, avril 1702, p. 367.
  2. Dangeau, t. VIII. p. 395.
  3. Ibid., juillet 1702, p. 46.