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talent contre ces attaques. Guéroult et Havin se défendirent eux-mêmes sans s’occuper des autres. Nefftzer eût voulu nous attirer en champ clos. — « Mais expliquez-vous donc, nous disait-il, faites-nous savoir pour quelles raisons vous vous êtes solidarisés entre vous, le Siècle et l’Opinion nationale. » — Comme l’ancien, au lieu de répondre aux accusai ions, nous montâmes au Capitole et publiâmes le compte rendu collectif de nos travaux. L’effet en fut immense. On fut stupéfait de l’activité infatigable avec laquelle les Cinq avaient, en dehors de ce qui se rattachait directement à la politique, traité tant d’affaires différentes : armée, finances, chemins de fer, législation civile, pénale, commerciale.

Un courant chaque jour plus irrésistible se prononçait dans toutes les circonscriptions en leur faveur et en celle de leurs candidats. Dans la seule circonscription de Thiers, l’élan ne se produisait pas. J’étais occupé de sa candidature plus que de la mienne, qui allait toute seule, et, soit verbalement, soit par lettres, je m’épuisais en recommandations qui n’étaient pas toujours bien accueillies. Les démocrates ne pouvaient se décider à nommer l’homme de la loi du 31 mai, et son mot : la vile multitude était sur toutes les lèvres comme une objection invincible. Le candidat officiel Devinck, industriel important, d’incontestable honorabilité, budgétaire autorisé et indépendant, excellent homme, avait une clientèle personnelle considérable. Persigny, qui nous avait déjà rendu un service signalé en nous débarrassant des comités, nous en rendit un second plus important en donnant de la popularité à notre seule candidature impopulaire.

Inopinément il entre de sa personne dans l’arène et fait insérer au Moniteur et placarder une lettre à Haussmann : « Je vous autorise à démentir de la manière la plus catégorique les bruits d’après lesquels le gouvernement, hésitant à combattre M. Thiers songerait à faire retirer son concurrent M. Devinck. Si M. Thiers, rendant hommage à la grandeur du nouvel Empire, se fût présenté au suffrage universel en ami de nos institutions, le gouvernement eût accueilli avec sympathie sa rentrée dans la vie publique ; mais, du moment où il a consenti à se rendre, pour s’en faire le champion, dans une réunion des anciens partis, uniquement composée d’ennemis déclarés de l’Empereur et de l’Empire, il a rendu lui-même impossible l’accueil