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Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 3.djvu/785

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légitimiste. « Je ne sais, lui répondis-je, mais, quant à moi, je suis résolu à me séparer de celui d’entre nous, grand ou petit, qui voudra enlever à l’opposition son caractère constitutionnel. — Il répondit : Vous avez raison. Je vous ferai des concessions, ajouta-t-il, je n’attaquerai pas l’Italie, je défendrai seulement l’indépendance du Saint-Siège. Il faut y prendre garde, cet homme veut devenir Pape et Empereur ! » ) Il me demanda si on ne pourrait, dans la 6e circonscription, substituer à Guéroult Dufaure qui venait d’échouer en trois endroits. — « Vous n’y pensez pas ! répondis-je ; toute l’opposition va se grouper autour de Guéroult. » Enfin il me pria d’aller retenir sa place à la Chambre : « Je ne veux pas être précisément à côté de vous, mais tout près ; mettez deux personnes entre nous. » A la Chambre je rencontrai Lanjuinais, venu aussi pour choisir sa place. Je l’engageai à se mettre auprès de Thiers, moi auprès de lui, et Picard auprès de moi ; nous constituerions ainsi le premier banc de l’opposition, si Auguste Chevalier consentait à nous céder sa place. J’allai prier Morny de le lui demander. Morny me le promit. Puis il me complimenta chaudement de mon élection, et me dit qu’il trouvait Persigny absurde d’avoir tant combattu Thiers et moi. Il était surtout frappé des échecs des cléricaux ; j’insistai sur les succès des libéraux, encore plus significatifs. Il n’en disconvint pas. « L’Empereur, ajouta-t-il, est entouré de gens qui le poussent à la réaction, mais, s’il en vient là, j’offrirai ma démission, et il s’arrêtera. » Il lui échappa de dire : « Si je vais au ministère de l’Intérieur, je présenterai une loi sur la presse. Je ne veux pas être exposé à ce qu’on me demande le matin des avertissemens qu’on blâmera le soir. »

Les élections de ballottage procurèrent encore quelques succès. Guéroult, soutenu loyalement par Nefftzer, fut élu avec une majorité de 7 000 voix. Les conseils d’abstention de l’Union, du Monde et de l’Univers ne retinrent qu’une portion des électeurs de Cochin et de Prévost-Paradol. Jules Favre obtint une seconde élection à Lyon. Quelques jeunes opposans l’emportèrent : Planat dans, la Charente, Maurice Richard dans Seine-et-Oise.


VI

Les vaincus de toute catégorie ne dissimulèrent pas leur exaspération. Nous avons perdu la première partie, nous prendrons