Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 3.djvu/809

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
803
LA DÉFENSE DE LA LÉGATION DE FRANCE.

dernière station, Ma-Kia-Pou, située à une heure de marche de Pékin.

M. Chamot, propriétaire de l’ « Hôtel de Pékin, » vient tout de suite se mettre à la disposition du colonel de Vogack et offrir ses services de guide et d’interprète. Mme  Chamot est là également : c’est la première Européenne que nous voyons ; tous deux sont à cheval et armés chacun d’une carabine.

Nous apprenons que les portes resteront ouvertes pour nous ; mais que l’on nous attendait avec impatience, le danger devenant de plus en plus certain et inquiétant.

Une quinzaine de membres des légations, tous à cheval, arrivent pendant que les hommes descendent et se rangent sur les quais de la gare.

Bientôt la colonne se met en marche à travers une quadruple ou quintuple haie de faces jaunes. Mais sur tout le parcours, en dehors des murs comme en ville, pas un seul cri, pas la moindre manifestation ; et cependant la foule accourue pour nous voir passer est énorme. On a dit que les Chinois étaient de 50 à 60 000 : ce chiffre ne me parait pas exagéré. Nous aurions pu être étouffés entre ces deux haies, avant d’avoir eu le temps de charger nos fusils.

Enfin, à huit heures et demie, les matelots trouvaient à la Légation de France un repos mérité. Le matériel, je l’ai dit, était resté à Tien-tsin, et ils durent se contenter pour dormir de quelques bottes de paille, ce qui ne parut nullement les gêner.

Quant à moi, dès que le ministre de France et Mme  Pichon, qui dînaient ce soir-là hors de la légation, furent de retour, j’allai leur présenter mes respects, et leur demandai ensuite l’autorisation de prendre congé d’eux pour aller, à mon tour, m’étendre sur un matelas.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

7 juin. — Les Boxeurs pénètrent en ville par groupes de cent environ, et se réunissent dans des pagodes. À l’extérieur, ils continuent leurs tristes exploits, et le nombre des chrétiens qui viennent chercher aide et protection au Pé-t’ang ou dans les légations augmente d’heure en heure.

Le directeur des chemins de fer a déclaré, dit-on, à M. du Chaylard que, par ordre du Tsung-Li-Yamen, aucun train ne serait mis à la disposition des troupes étrangères qui tenteraient de se rendre à Pékin.