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REVUE DES DEUX MONDES.

La mitrailleuse autrichienne est placée au milieu de la barricade ; sur son masque blanc plusieurs projectiles s’aplatissent.

À huit heures, les Chinois essaient d’incendier la légation d’Autriche ; ils sont chassés par les feux croisés des Français et des Autrichiens, des Anglais et des Japonais. La fusillade dure toute la nuit ; plusieurs balles venant du nord-ouest et du sud-ouest passent très haut au-dessus de nos têtes. Le quart à la barricade est fait alternativement par les Français et les Autrichiens, à partir de neuf heures. M. Kollar est chargé de régler le service.

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22 juin. — À cinq heures, les Français quittent le quart et le remettent aux Autrichiens. Notre repos ne devait pas être de longue durée : à six heures, une attaque violente est dirigée à la fois sur la barricade et sur celle de l’Italie ; cette dernière surtout est fortement menacée. Les Chinois se sont brusquement jetés en avant et ont pris position dans les maisons de la rue de la Douane et de la rue des Légations. Les Autrichiens craignent avec raison de laisser leur mitrailleuse entre les mains de l’ennemi si l’Italie, en cédant, leur coupe la retraite ; en conséquence, ils abandonnent la barricade et se replient dans la rue des Légations. Ce mouvement est mis à profit par les Chinois qui envahissent toute la rue et mettent le feu aux bâtimens de la Douane.

L’attaque paraît être générale, car dans toutes les directions on entend une assez forte fusillade.

Un incendie se déclare tellement près de la barricade italienne, que nous croyons que c’est elle qui brûle. (Elle est faite avec de très grosses poutres.)

Au même instant, un Américain vient nous prévenir que les Américains ne peuvent plus tenir, et qu’ils vont abandonner leur position. Abandonner leur position, c’est laisser les Chinois envahir la muraille, c’est leur permettre de pénétrer dans la rue des Légations par l’autre extrémité, et, par suite, de prendre entre deux feux le Japon, l’Allemagne, la France, l’Autriche et l’Italie ; c’est empêcher la jonction de toutes ces légations avec la légation d’Angleterre.

Il se produit un moment de panique facile à comprendre, surtout si l’on songe que tous ces événemens se déroulent en moins de temps qu’il n’en faut pour les relater.

Le matelot autrichien Joseph Bernardis est blessé.