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— leurs doubles, — lesquels, un moment après, s’en retournent par le même chemin.

Les trappes, par où s’effectuent les apparitions et les engloutissemens, servent aussi aux prestigieux changemens de costume : cette vieille en haillons, courbée en deux, n’est autre, vous le devinez, que la ravissante fée des eaux. Son vêtement n’est formé que de deux pièces, l’une devant, l’autre derrière, du haut en bas desquelles passent des cordelettes, pourvues d’un anneau à leur extrémité inférieure. Au moment où doit s’opérer sa transformation, l’actrice se place au point de repère, marqué à la craie, et détache prestement la rosette qui retient les fils autour de son cou. Une trappe discrète s’entr’ouvre, la main d’un machiniste saisit les anneaux, et toute la défroque, entraînée par eux, est escamotée en une seconde. D’autres trappes, dites « à tampon, » usitées dans les pantomimes, lancent à deux mètres en l’air des clowns, qui retombent sur leurs pieds après quelques cabrioles. D’autres encore, composées de volets en lames d’acier flexible, permettent de s’engouffrer brusquement dans le sol ou de s’enfoncer dans un mur qui ne présente aucune fissure apparente.

Si les démons et les mauvais génies sortent des dessous et y rentrent, c’est du cintre que doivent descendre les sylphes, les anges et autres individualités affectives ; c’est là aussi qu’elles remontent après avoir rempli leur mission. Les ascensions de cette sorte étaient fréquentes dès le milieu du siècle dernier et les procédés ont peu varié : au corsage matelassé, garni de courroies et de boucles, que portent les figurantes chargées de l’emploi, sont accrochés un et souvent deux fils d’acier, — pour le cas où l’un des deux se romprait, — et, si l’on souhaite qu’elles disparaissent par un vol oblique, un petit chariot, glissant sur des rails aériens, — le « brigandin, » — imprime une marche horizontale au fil qui les enlève verticalement.

Deux rails analogues, posés sur des plans inclinés comme ceux des montagnes russes, donnent licence aux Valkyries de chevaucher sans péril à traders les nuages. Celles qui chevauchent ne sont pas celles qui chantent ; celles-là sortent simplement de la coulisse. Elles n’auraient jamais le temps de dévaler de l’Empyrée à l’avant-scène pour prendre part au chœur des messagères d’Odin. Les vierges cuirassées, qui fendent les airs, sont des demoiselles du corps de ballet ; cette promenade leur vaut un