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la formation d’un long banc sous-marin. Ce seuil a peu à peu émergé ; c’est la pointe du Hoc, qui se recourbe en bec d’ancre. Derrière cette digue naturelle, les eaux tranquilles ont déposé la vase et la marne qu’elles tenaient en suspension. La perte de l’atterrage d’Harfleur a été en définitive la conséquence fatale de la formation de la plaine de l’Eure. La Lézarde, qui débouchait dans un golfe, traverse aujourd’hui une plaine colmatée en s’y frayant un lit sinueux. Une médiocre écluse de chasse y entretient encore de temps à autre une certaine profondeur ; mais le port a perdu presque toute son importance et se réduit à un modeste quai de 250 mètres à peine. Malgré le petit canal creusé par Vauban pour le relier au Havre et le voisinage de Tancarville, le port d’Harfleur est désormais déchu. La pêche seule y est toujours assez active. Quelques bateaux anglais y viennent aussi de temps à autre décharger un peu de charbon, pour retourner ensuite presque toujours sur lest ; et il a conservé encore quelques relations avec Honfleur et même avec Dunkerque ; mais le mouvement commercial ne dépasse guère 6 000 tonnes. Harfleur a été peu à peu complètement abandonné, et pour les mêmes raisons que Lillebonne. Le Havre, qui est à leurs portes, a tout absorbé[1].


CHARLES  LENTHERIC.

  1. Cf. Mémoires de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, t. XIX, et Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie, t. XII, XIV, XVI et XXIV.