aussi indifférent à ce que nous faisons chez nous que nous le sommes à ce qu’il fait chez lui. Nous parlons, bien entendu, de cette indifférence de l’homme politique qui ne tient compte que des rapports des pays entre eux, et non pas de ce que ces pays sont spécifiquement en eux-mêmes. Chacun reste libre dans sa conscience de porter un libre jugement sur tels faits particuliers, ou sur un ensemble de faits ; mais, lorsqu’il s’agit de relations à établir entre certaines forces, ce sont ces forces qu’on pèse, et l’alliance formée entre elles laisse intacte au dedans la souveraineté de l’État. La venue de l’empereur de Russie en France, n’intéresse donc en rien notre politique intérieure : elle est seulement une garantie précieuse pour notre politique extérieure, qui n’a d’autre but que le maintien de la paix avec la sauvegarde de nos intérêts et le respect de notre dignité.
Il était bon qu’une manifestation nouvelle de la continuité et de la solidité de l’alliance se produisît en ce moment : quelques personnes à l’étranger affectaient, en effet, de les mettre en doute. Si l’empereur Nicolas s’était contenté d’aller à Dantzig, sans venir aussi à Dunkerque et à Reims, on n’aurait pas manqué de tirer de ce fait des conclusions qui nous auraient été peu favorables. La nouvelle de son voyage en France, avec la signification toute politique qu’on est bien forcé de lui reconnaître, ne permet plus de se méprendre sur la persistance de nos bonnes relations. La presse européenne a dû en convenir : elle l’a fait avec correction. Elle a été unanime à reconnaître que l’alliance franco-russe ne devait provoquer aucune inquiétude pour le maintien de la paix. C’est bien ainsi que nous l’entendons. On peut dire que l’alliance a fait aujourd’hui ses preuves : elle est assez connue pour que personne ne lui attribue de mauvais desseins. Si elle avait été faite dans des intentions différentes de celles qui ont été publiquement avouées, ces intentions n’auraient pas tardé à se convertir en actes, et les circonstances propices n’auraient pas manqué pour cela. Mais on a pu en quelque sorte expérimenter l’alliance franco-russe, soit en Europe, soit en Orient, soit en Extrême-Orient. Si l’on a vu deux pays qu’aucun intérêt ne divisait et qui se trouvaient toujours d’accord en politique, on a constaté aussi qu’ils travaillaient constamment dans le sens de la paix. Il semble donc qu’une démonstration nouvelle de la vitalité de l’alliance ne doive porter ombrage à personne : pourtant il y a eu généralement une certaine réserve dans les félicitations qu’on nous a adressées et dans la confiance qu’on a affecté d’éprouver.
Cela tient peut-être, — et quelques journaux, en Autriche en par-