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faire des auxiliaires dévoués à la tâche si difficile qu’ils avaient assumée.

Jusqu’en 1835, les colons restèrent confinés dans un étroit espace de quelques kilomètres de rayon autour d’Alger ; il leur était défendu de franchir les limites du Sahel, l’accès de la Mitidja leur était interdit. Pour justifier une telle mesure, le gouvernement alléguait qu’il y avait lieu de craindre pour les immigrés l’influence du climat et qu’il ne fallait pas inquiéter les Arabes dans la possession de leurs terres. Mais les prétextes allégués n’étaient pas le vrai motif qui faisait interdire par le gouvernement aux colons la mise en valeur de la Mitidja. Au milieu des embarras politiques et des dangers qui la menaçaient, la monarchie de Juillet ne savait si elle ferait bien de conserver ou d’évacuer l’Algérie. Dans les conseils du gouvernement et au Parlement, on flottait entre les idées de complète évacuation, d’occupation restreinte et de conquête définitive, et en interdisant aux colons de dépasser un rayon de quelques kilomètres au-delà des fortifications d’Alger, le gouvernement entendait ne pas aliéner sa liberté d’action et ne voulait pas laisser s’établir un état de choses qui pût l’amener à payer, en cas d’évacuation, des indemnités aux colons.

Les premières années qui suivirent l’occupation, on discuta s’il ne valait pas mieux abandonner l’Algérie. Le système de complète évacuation trouvait d’ardens partisans dans le pays et à la Chambre. Dans la séance du 7 mars 1834, M. de Rémusat déclarait que la question algérienne était une question réservée, que tout ce qui avait été fait jusqu’alors devait être tenu pour provisoire. « La colonisation est une chose absurde, ajoutait M. Dupin, point de colons, point de terres à leur concéder, point de garanties surtout à leur promettre. Il faut réduire les dépenses à leur plus simple expression et hâter le moment de libérer la France d’un fardeau qu’elle ne pourra et qu’elle ne voudra pas porter plus longtemps. » Le système de l’évacuation complète ne fut complètement abandonné que vers 1835. En dépit des incertitudes gouvernementales, les colons ne cessaient d’affluer en Algérie. En 1835, ils atteignirent le nombre de onze mille. Entassés dans la ville où les logemens avaient atteint des prix fantastiques, les immigrés réclamaient à grands cris qu’il leur fût permis de se répandre dans la Mitidja. Leurs plaintes finirent par trouver de l’écho à Paris et décidèrent le gouvernement à envoyer sur les lieux une commission de pairs et de députés avec