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royal se développe chez les Hohenzollern. Dans l’œuvre brandebourgeoise de M. de Wildenbruch, ils symbolisent l’éternelle justice, la bienfaisance toute-puissante, l’omniscience divine. Ils sont les représentais ou les envoyés de Dieu. C’est lui qui leur tracé leur voie à travers l’histoire, c’est lui qui les éclaire jusque dans les plus petites choses : car leur coup d’œil est infaillible ; ils lisent dans la conscience de leurs sujets aussi facilement que le Seigneur lui-même ; ils ne se trompent jamais ni sur leurs destinées, ni sur celles de la nation qu’ils conduisent, ni sur les détails de la vie privée des plus humbles particuliers. Ils sont, en un mot, les êtres suprêmes dans le peuple élu. Ici encore, le poète ne fait que reprendre, pour la formuler par ses moyens propres, une idée que nous retrouvons en maint endroit des discours de Guillaume Inexprimée avec une ardeur de conviction souvent saisissante.

« La confiance avec laquelle je prends la place où m’appelle la volonté de Dieu est inébranlablement ferme, car je sais quel sens de l’honneur et du devoir nos glorieux ancêtres ont implanté dans l’armée[1]… » — « S’il nous a été donné de réussir dans ce que nous avons entrepris, c’est avant tout parce que dans notre maison, nous avons la tradition de nous regarder comme institués par Dieu pour gouverner les peuples, sur lesquels il nous a été départi de régner, et pour les conduire à leurs fins dans le progrès de leurs intérêts matériels et spirituels[2]. » — «… La maison régnante des Hohenzollern est munie d’un sentiment du devoir qu’elle puise dans sa conscience d’avoir été placée par Dieu à cette place, et de n’avoir de comptes à rendre qu’à lui seul et à la conscience de ce qu’elle fait pour le bien du pays[3]. »

Mais s’ils sont les « grands premiers rôles » des pièces brandebourgeoises de M. de Wildenhruch, les Hohenzollern n’en sont pas les seuls héros : il y a leur peuple — nous venons d’en voir des exemples — et une fois au moins, le poète a su le mettre en scène et l’expliquer avec une véritable force, dans le drame intitulé Pères et Fils dont la première représentation remonte à l’année 1882. Je voudrais éviter de le raconter : on a déjà pu le

  1. Armeebefehl, 15 juin 1888, Reden, p. 7.
  2. Grundsteinlegung des Kaiser Wilhelms Denkmal in Bremen, 21 avril 1890, id. p. 101.
  3. Festmahl des Brand. Provinziallandtages, 28 fév. 1894, id. p. 265.