combinera tout cela aussi bien qu’un autre, et cela serait parfait, sans la difficulté qui subsiste : les aventures de ces personnages, sans lesquels il n’y aurait pas de drames, pourraient se passer n’importe où ; mais leur raison d’être, c’est de fournir un cadre dramatique aux Hohenzollern, qui poursuivent dans les coulisses leur savante politique. Il s’agit donc de rattacher ces épisodes privés à l’histoire nationale, c’est-à-dire de commander une manœuvre où tout l’intérêt se porte sur les soldats, mais qui doit pourtant manifester l’éclat des chefs. C’est là qu’intervient l’habileté, — qualité par essence inconciliable avec la poésie ; — c’est là que M. de Wildenbruch se trouve forcé de remplacer, hélas ! par beaucoup d’adresse, l’art simple et profond des maîtres qu’il voudrait suivre, et dont il reste quelquefois digne. Et c’est dommage, car avec ses défauts, son œuvre n’égale exprime un sentiment fort, qui paraîtra singulier à des lecteurs élevés dans un régime démocratique, mais qui vaut qu’on l’examine et qu’on le comprenne ; elle attire notre attention sur une partie de l’histoire qui, pour être plus instructive que dramatique, n’en est pas moins d’un très vif intérêt ; surtout elle nous explique, avec ce sens des généralisations qu’ont les poètes et qui peut être clairvoyant, le développement si rapide d’un petit peuple dont on a parfois peine à s’expliquer l’étonnante fortune. Si le poète n’est pas un grand poète, il fait du moins tout ce qu’on peut faire, lorsque, avec des dons très réels, sinon d’ordre extraordinaire, on entreprend de mettre son œuvre au service d’une conviction ferme et d’un sentiment fort.
EDOUARD ROD.