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L’approche de la réouverture du Congrès ramène à Washington, vers la fin de novembre, le monde politique et parlementaire. Le Président va entrer cette fois en contact avec les Chambres. Le message qu’il leur adresse au début de la session lui fournit l’occasion d’exposer ses vues générales sur la politique intérieure et extérieure du pays. Il ne s’agit point ici d’une sorte de « discours du trône » en quarante ou cinquante lignes, comme celui qui est lu, au nom du Roi, en Angleterre, ou comme celui qui était transmis en France au Corps législatif, sous le second Empire, dans lequel il est fait une allusion plus ou moins directe aux principales questions à l’ordre du jour. C’est un compte rendu minutieux de tous les événemens de quelque importance qui se sont accomplis depuis la dernière session parlementaire, en même temps qu’un véritable programme de gouvernement, développé dans un mémoire qui, parfois, n’a pas moins de quarante pages in-octavo.

Nous avons sous les yeux le texte du message présidentiel du 3 décembre 1895. Il y est question successivement, tant au point de vue politique que commercial, de la République Argentine, du Brésil, du Chili, de la Chine, du Japon, de la France, de l’Allemagne, de l’Angleterre, de l’Italie, des îles Sandwich, du Guatemala, du Mexique, du Nicaragua, de la Russie, de l’Espagne, de Cuba, de la Turquie et des affaires Arméniennes. La politique intérieure n’y tient pas moins de place. L’exposé de la situation financière des Etats-Unis y remplit à lui seul 17 pages.

Le message présidentiel ne comporte point de réponse et ne donne pas lieu (comme par exemple en France sous Napoléon III) à la rédaction d’une « Adresse » destinée à mettre en relief les « desiderata » du Parlement. Il ne fournit non plus matière à aucune discussion générale. Il ne faut y voir qu’une sorte de mémorandum où sont consignées les vues du chef de l’Etat. Le Congrès est invité à s’en inspirer, il s’en inspire souvent, surtout lorsque la majorité ; de ses membres appartient au même parti que le Président, mais il n’est point tenu de le faire, pas plus d’ailleurs que le Président n’est obligé de tenir compte des vœux du Congrès même exprimés par une série de votes, à moins que ces votes ne revêtent une forme spéciale (joint resolutions) que nous aurons l’occasion de définir plus complètement[1].

  1. Même alors il reste encore au Président la faculté de frapper les résolutions parlementaires d’un veto qui, bien que n’étant que suspensif, suffit neuf fois sur dix, comme nous le verrons tout à l’heure, à en arrêter la promulgation.