gouvernement de la République qui recevait l’Empereur de Russie, et on a pu prendre des mesures pour que les choses se passassent comme elles devaient se passer. Cependant, il a bien fallu exhiber M. Arnould, de même qu’à Paris on n’aurait pas pu cacher M. Dausset ; mais M. Arnould s’est comporté tout autrement que ne l’aurait fait M. Dausset qui, n’étant pas radical socialiste, aurait agi simplement en homme bien élevé. Ce n’est pas que M. Arnould ait rien dit de déplacé à l’Empereur ; non assurément ; nous n’en sommes pas encore là. Mais il a supprimé en lui parlant, toutes les formules de convenance et de respect dont il est d’usage et de règle de se servir à l’égard d’un souverain. Les mots de Sire et de Majesté auraient évidemment écorché sa bouche, et — ce qui est bien plus grave ! — les oreilles de ses électeurs. Aussi M. Arnould s’en est-il abstenu avec soin. Le tsar n’a pas eu l’air de s’en apercevoir et probablement il s’en est amusé au fond de l’âme : pour la première fois, il se voyait en présence d’un vrai démocrate, et il a pu examiner de près cette espèce d’homme.
Le cas du maire de Lille a plus d’importance, parce que les suites qui y ont été données, ou plutôt qui n’y ont pas été données, engagent la responsabilité du gouvernement dont il a mis au grand jour la faiblesse ou l’impuissance. M. le président du conseil, ministre de l’Intérieur, avait chargé ses préfets de transmettre aux maires l’invitation de pavoiser les monumens publics pendant le voyage des souverains russes en France. Il ne s’agissait pas seulement des villes qui devaient avoir l’honneur d’une visite impériale, mais de toutes : il était, en effet, convenable que les monumens publics ne restassent pas seuls sans drapeaux, ni décoration d’aucune sorte, pendant que les maisons particulières en seraient revêtues. L’ordre ou l’invitation adressé aux maires était d’ailleurs inutile : partout, et très spontanément, les municipalités s’étaient préparées à s’associer à la joie nationale et aux démonstrations auxquelles elle donnait lieu. Mais à Lille, il n’en a pas été ainsi : le maire, M. Delory, ne l’a pas toléré. Il était à Roubaix au moment des fêtes ; il y assistait à un congrès socialiste. C’est là qu’il a appris que, conformément aux instructions préfectorales, son adjoint s’apprêtait à orner les monumens publics de drapeaux et de lampions : il a quitté Roubaix à la hâte et a couru à Lille, pour empêcher ce qu’il considérait comme un scandale. Il y avait là un fait grave, et qui l’est devenu plus encore par la manière démonstrative et bruyante dont il a été accompli. Le maire de Lille avait incontestablement mérité qu’une mesure administrative fût prise contre lui. Quelques jours auparavant, celui de Réthel, dans