Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 5.djvu/881

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

militaires à l’exclusion de l’élément civil ; système de colonisation civile avec des immigrans débarqués de France et de l’étranger ; système de colonisation mixte avec élémens civils, mais placés sous la direction de l’autorité militaire ; tout avait échoué ou n’avait donné que des résultats fort médiocres et nullement en rapport en tous cas avec les efforts et les dépenses effectuées. On avait fondé des villages, et on n’avait pu leur assurer des habitans. On avait voulu donner de l’impulsion à l’agriculture, et la colonisation avait été arrêtée dans son essor ; l’émigration volontaire et libre avait été à peu près tarie ; on avait amené même la dépopulation du pays ; la propriété avait été avilie ; le colon avait été ruiné ; un discrédit général planait sur la colonie. Tel est le bilan de la colonisation officielle qui fut pratiquée de 1840 à 1851, soit dans les territoires civils, soit dans les territoires militaires. Devant de pareils résultats, administration et colons firent entendre un concert de récriminations, rejetant l’un sur l’autre la responsabilité du désastre. L’administration reprochait à ces derniers leur ignorance des choses de l’agriculture, leur paresse, leur turbulence, surtout leur avidité à solliciter sans cesse les secours de l’Etat et leur manque d’initiative à tenter quelque chose par eux-mêmes. Les colons reprochaient à l’administration le mauvais emplacement de bon nombre de centres de colonisation, soit au point de vue de l’hygiène, soit au point de vue du trafic, le peu de solidité des constructions, l’insuffisance des instrumens aratoires et du cheptel mis à leur disposition, le manque de voies de communications, l’absence de toute liberté politique ou municipale, etc. Les causes multiples de l’échec de la colonisation officielle furent d’ailleurs résumées à l’Assemblée nationale par M. Lestiboudois, rapporteur de la commission chargée, en 1851, de l’examen d’un projet de loi relatif à l’achèvement de l’installation des colonies agricoles. « Indépendamment de l’inaptitude de la majorité des colons pour les travaux agricoles, disait-il dans son rapport, la difficulté des défrichemens, les inconvéniens inhérens à l’administration militaire, les maladies, le travail en commun rendu souvent nécessaire par la situation d’établissemens nouveaux, le dénuement d’une population qui n’avait pas de ressources par elle-même et à laquelle l’Etat donnait difficilement tout ce qui est nécessaire à la vie civilisée, enfin tous les maux qui résultent d’entreprises trop hâtées par des circonstances impérieuses, ont paralysé les