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de Manoune, cela ne l’eût probablement pas empêchée de flirter avec un littérateur. Au dernier acte, Mme Chaisles, qui a été pour Geneviève une éducatrice sans tendresse, fait mine de la mettre à la porte, sous prétexte qu’elle a ses vingt et un ans, et que, lorsque les filles sont majeures et désobéissantes, une mère chrétienne a parfaitement le droit de les mettre à la porte. Alors Manoune laisse échapper son secret et tout finit par un embrassement général. Pour voir clair dans ces ténèbres et s’orienter dans cette incohérence, il faudrait des lumières qui me manquent.

Mlle Suzanne Desprès était chargée du rôle de Manoune ; plaignons-la et n’essayons pas de la juger. Mme Samary préside à merveille son comité de dames patronnesses. M. Huguenot s’est taillé un joli succès dans un rôle de second plan.


La Comédie-Française a recommencé de faire parler d’elle, et de la façon qu’il ne faudrait pas. Nous avons toujours refusé de nous associer à la campagne menée contre son administration actuelle, les commérages de concierge et les médisances de couloir n’étant pas de notre goût. Nous ne savons de ce qui se passe dans cette maison que ce qu’en peut savoir un spectateur assis dans sa stalle. Mais le fait est que le spectacle est déconcertant. Au printemps dernier, on nous conviait à la répétition générale de trois pièces, dont les deux premières ont dû être retirées après la représentation et la troisième n’a pu être jouée. A l’occasion d’une autre pièce annoncée pour la rentrée d’octobre, les mêmes incidens se sont reproduits. La Comédie monte peu d’ouvrages nouveaux ; ceux qu’elle monte, elle n’ose plus les jouer. Telle est la situation. Pour y remédier, on s’est avisé d’un moyen dont on mène grand bruit : c’est la suppression du comité de lecture. De ce comité, parait-il, vient tout le mal. Qu’on le supprime donc !… à moins qu’on ne préfère le garder ; car les instrumens ne sont rien : ce qui importe, c’est la manière de s’en servir.


RENE DOUMIC.