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Page:Revue des Deux Mondes - 1902 - tome 10.djvu/546

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JOURNAL DE BORD DU FONTENOY

DANS LE PORT

5 décembre 1901. — « Vous savez, nous rentrons dans le port… »

Cette phrase à effet lancée à pleine voix, Marnier, l’homme à nouvelles du bord, vient s’asseoir, important et froid, à la table du carré encombrée des journaux de la timonerie, des derniers numéros des « Tablettes » et des reliefs du petit déjeuner.

Nous rentrons dans le port !… Ah ! ah ! tout le monde a dressé la tête. On se lève, on entoure Marnier : d’où tient-il ça ?… Quand rentrerons-nous ? Pour combien de temps ? .. Et déjà la nouvelle fait le tour du bateau, passant de l’office du carré au bureau du détail, courant au poste des fourriers, chez les maîtres, chez les seconds maîtres ; volant dans la batterie, où l’équipage prend la tenue du jour, et puis descendant dans les fonds, jusqu’au compartiment des dynamos, à la cambuse, dans la chaufferie…

D’un effet certain, la phrase, oui ; mais aussi d’effets très divers selon l’âge, le grade, la position.

Enchantés, les jeunes officiers, enseignes et aspirans, qui auront plus de liberté, qui prendront la bicyclette pour venir à bord, au lieu du canot-major où l’on s’entasse, courbant le des sous les embruns, qui auront chambre en ville, qui auront… hum ! — Bref, enchantés, les jeunes officiers.

Enchantés, les autres aussi, les lieutenans de vaisseau, les