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Page:Revue des Deux Mondes - 1902 - tome 10.djvu/702

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REVUE SCIENTIFIQUE

HISTOIRE NATURELLE DES MOUSTIQUES

On connaît les idées nouvelles sur le rôle des moustiques dans la transmission des maladies[1]. Ces insectes sont considérés aujourd’hui comme des agens pathologiques de première importance. Ils ne sont pas seulement le tourment de notre repos ; des ennemis acharnés, bruyans, douloureux, exaspérans ; ils ne se contentent point de sucer quelques gouttes de notre sang et d’instiller, à sa place, dans les piqûres qu’ils nous font, un venin extrêmement cuisant. Avec les seules armes que la nature leur ait données, ils réussissent déjà à rendre intenables à l’homme (et aussi aux quadrupèdes et aux oiseaux) les régions où ils pullulent : par exemple, certaines terres basses de la Cochinchine, ou, sous un ciel plus froid, quelques plages marécageuses de Terre-Neuve. Mais, de plus, leurs armes sont empoisonnées. En même temps qu’ils nous blessent, ils nous inoculent les germes de maladies redoutables dont eux-mêmes sont atteints : le paludisme, la filariose, la fièvre jaune. Ce sont les moustiques qui introduisent dans notre sang le sporozoaire de Laveran, qui est la cause première de la fièvre intermittente ; l’embryon de la filaire, qui est le point de départ de la fièvre hématurique, de la chylurie et de l’éléphantiasis ; et, enfin, le bacille hypermicroscopique qui produit la fièvre jaune, ou vomito negro.

On voit, d’après cela, le degré de malfaisance que leur assigne la doctrine régnante. Leur part indirecte dans la mortalité des pays chauds est énorme. Leurs victimes sont innombrables. Ils ont

  1. Voyez l’Hématozoaire du Paludisme, dans la Revue du 1er février 1902. — Le rôle des moustiques dans la propagation des maladies, 1er mars 1902.