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aux troubles prolongés et profonds du Soudan central depuis les ravages du conquérant noir Rabah, les renseignemens et les descriptions de nos explorateurs récens ne contredisent aucunement les données du célèbre voyageur allemand de 1850 à 1855 ; pour qui sait lire, comparer et réfléchir, ils les confirment dans leurs traits généraux.

Ce que nous demanderons à tous ces documens, aux récens comme aux anciens, ce ne sont pas des appréciations générales ou des conclusions ; ce sont seulement des constatations de faits, des descriptions précises de la nature des lieux et de celle des hommes. Un explorateur est un informateur ; il dit ce qu’il a vu, et la confiance que l’on peut avoir en lui dépend du soin méticuleux qu’il prend de rassembler des données positives. La coordination de ces données, les conclusions qu’il convient d’en tirer ne rentrent pas dans sa tâche, et, parfois, excèdent sa compétence. Un explorateur, homme d’action et d’endurance physique et morale, ne peut être ni un ingénieur, ni un économiste, ni un homme politique ; il n’a le plus souvent qu’une préparation insuffisante à ces trois points de vue, surtout aux deux premiers. Les divers incidens du voyage, son état de santé ou de maladie peuvent, en outre, influer sur son humeur et sur ses jugemens généraux ; ils n’influent pas, au contraire, ou influent moins sur ses relevés de faits positifs et précis.


II

Depuis un quart de siècle, l’on projetait en France la traversée du Sahara central, d’Ouargla au lac Tchad, soit du 33e degré de latitude nord au 14e. La seconde moitié de cet itinéraire environ, du 23e degré à Zinder, dans le Soudan, un peu au-dessous du 14e degré et de cette ville au Tchad, avait été effectuée, en 1850, par Barth ; puis la même ligne à peu près avait été parcourue en 1877, par un autre voyageur allemand, de Bary ; mais tous les deux avaient fait l’autre moitié de la traversée par la Tripolitaine et le Fezzan. Le colonel Flatters, en 1881, dans son second voyage, si cruellement interrompu, était arrivé au-delà du 24e degré, quand il fut assassiné, avec la plus grande partie de son escorte, à un endroit que l’on a nommé longtemps Bir-el-Gharama et que l’on a reconnu depuis être le puits de Tadjenout. Les rares survivans de cette seconde expédition Flatters, n’ayant