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et de ces peurs qui en empêchent. J’espère que cela nous sauvera de la guerre cette année. Un de mes amis italiens m’écrit de Pise qu’on fait entendre raison à l’héroïque niais de Caprera, qu’il se tiendra tranquille, qu’au besoin, on le tiendra. Il n’y compte que jusqu’à un certain point. Je compte un peu plus sur la mine imposante des Croates qui bordent le Mincio. Messieurs les volontaires en chemises rouges ont moins d’appétit pour les Croates que pour les Napolitains, et il y a encore de l’ouvrage à faire dans le royaume de Naples, et c’est là qu’ils iront de préférence. Avez-vous remarqué que les chefs du mouvement contre-révolutionnaire dans les Abruzzes sont tous des étrangers ? Je voudrais bien vous demander, à vous qui êtes diplomate, si c’est un casus belli, quand une bombe tombe sur la tête d’un ministre étranger en résidence auprès d’un roi à qui cette bombe était destinée. Il me semble que c’est là un des mauvais côtés de la carrière

Je reviens de Nice qui abonde de Russes. J’en ai trouvé un qui m’a paru assez instruit des choses et des hommes, et qui, à propos de la tartine de M. Guizot sur les picoteries entre Louis-Philippe et Nicolas, m’a dit que la véritable raison de la mauvaise humeur de l’Empereur contre Casimir Perier était que Perier portait toute sa barbe, ce que S. M. ne pouvait souffrir.


J’ai encore vu à Nice, qui est notre capitale à nous autres, la fille de Mrs X…, en cuisinière ou approchant, héritière de quatre-vingt mille livres sterling. Elle va épouser lord N…, fils du duc de L…, ruiné comme son père. Elle est petite, pas trop laide, et a de très beaux cheveux.

Que dites-vous des discours belliqueux de Sa Majesté prussienne ? Parmi tous les poltrons braillards et belliqueux, les Prussiens tiennent un rang distingué. Je désire bien vivement que les Danois leur donnent une bonne raclée et je ne crois pas la chose impossible.

Mais ce après quoi je soupire le plus, c’est pour voir de bien plus grands braillards, les citoyens des États jadis Unis, se donner des taloches. On dit que corsaires attaquant corsaires ne font pas leurs affaires, mais la vanité des méridionaux aidée par celle des septentrionaux parviendra, je crois, à faire parler la poudre