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flottent dans ses mains, et on se demande même s’il les tient encore. Au surplus, ne nous a-t-il pas averti que sa grande, sa seule affaire était d’appliquer la loi sur les congrégations ? Et ne voit-on pas plus clairement que jamais que c’est de ce côté seulement qu’il y a un danger pour la république ?


Mais enfin, M. Combes est un peu déchargé, pour le moment, de veiller à ce danger, puisque la commission dont nous avons parlé plus haut, la grande commission des congrégations, est enfin élue et qu’elle fonctionne. Le gouvernement lui a remis tous les dossiers des congrégations d’hommes : il y en a, paraît-il, soixante-deux. Sur ce nombre de congrégations, combien ont-elles trouvé grâce devant M. le président du Conseil, ministre de l’Intérieur et des Cultes ? Cinq ou six, qui sont, paraît-il, des congrégations contemplatives ou occupées à des travaux agricoles. A toutes les autres sans exception, il propose de refuser l’autorisation. L’hécatombe prendra donc des proportions considérables. Nous voilà loin des assurances que donnait M. Waldeck-Rousseau, lorsqu’il protestait avec quelque énergie, au cours de la discussion de la loi, contre toute idée de tendre un piège aux congrégations et leur conseillait de demander à être reconnues. Leurs demandes devaient être l’objet d’un examen impartial, et il ressortait du langage de M. le président du Conseil de cette époque qu’un nombre raisonnable d’entre elles seraient accueillies favorablement. Qui peut savoir aujourd’hui quelle était la véritable pensée de M. Waldeck-Rousseau ? Et comment la lui demander, puisque, après avoir vogué dans les mers du Nord pendant l’été, il vogue dans les mers du Midi pendant l’automne, laissant amis et adversaires se dépêtrer comme ils pourront de l’embarras où il les a mis ? Nous serions très étonnés si, à son retour, il trouvait tout parfait, et s’il félicitait M. Combes d’avoir été son interprète et son continuateur fidèle : mais il sera un peu tard pour parler, quand le mal sera fait.

Quoi qu’il en soit, la commission de la Chambre s’est trouvée en présence d’une grande difficulté. La loi ayant décidé que les demandes d’autorisation seraient accordées ou rejetées par le Parlement, et le Parlement ne pouvant lui-même procéder que par des lois, il en faut soixante-deux pour fixer le sort de toutes les congrégations postulantes. C’est beaucoup, nous en convenons. Il y a là une première difficulté ; mais ce n’est pas la plus grave, et le gouvernement a essayé de l’atténuer. Il a divisé les congrégations en plusieurs catégories suivant leurs traits généraux, de façon à n’avoir à présenter qu’un exposé