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Röntgen. Ce savant physicien a montré que certains rayons (rayons X) sont capables de traverser des substances opaques, par exemple, une feuille de papier noir, pour venir impressionner une plaque photographique. La même chose a lieu pour le sel d’uranium : enveloppé d’un papier noir imperméable à la lumière et posé sur la plaque, il y détermine une impression très nette. Il émet des rayons qui, perçant l’écran opaque, vont agir sur le gélatino-bromure. Ce rayonnement n’est pas un rayonnement lumineux, puisque la lumière que le corps pourrait émettre à la rigueur pendant 1 centième de seconde après qu’il a été soustrait à l’éclairement, ne peut pas traverser le papier noir. Il a de grandes analogies avec le rayonnement de Röntgen. Mais il s’en distingue par un trait capital. C’est que son émission n’est point provoquée par l’électricité appliquée à un gaz raréfié ; elle ne l’est pas davantage par la lumière ; elle ne l’est par rien de connu. Elle semble spontanée. Les composés d’uranium émettent donc, d’eux-mêmes, des radiations invisibles, traversant les corps opaques ou transparens à la lumière, et possédant, entre autres propriétés, celle d’agir photogéniquement.


I

Avant d’entrer dans l’étude des divers phénomènes présentés par l’uranium il importe de remarquer que beaucoup d’autres corps et des circonstances très diverses peuvent donner naissance à des rayons analogues.

Ces rayons, on a pu les appeler, au début, rayons uraniques. La désignation a parfaitement convenu, tant que l’on n’a pas connu d’autres substances que les composés de l’uranium et l’uranium lui-même, qui présentassent ce curieux caractère. Mais il était difficile de croire qu’une manière d’être si remarquable fût le privilège d’un corps unique et que l’atome d’uranium fût une exception dans la nature. On lui chercha donc des similaires, et précisément parmi les corps qui s’en rapprochent chimiquement. L’uranium est un des métaux dont l’atome est le plus lourd : son poids est exprimé par le nombre 240. Proche de lui, à cet égard, est le thorium dont l’atome pèse 232, et qui d’ailleurs lui est uni dans les mêmes minerais. M. Schmidt (de Berlin) porta ses investigations de ce côté. Il trouva, en 1898, que les composés du thorium se comportaient comme ceux de l’uranium, et M. Curie confirma presque aussitôt le fait.

D’autres acquisitions suivirent celle-là. On rencontre dans les mines