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Page:Revue des Deux Mondes - 1902 - tome 7.djvu/439

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de faire voyager sa triste femme et les fils de ses frères d’une ville dans une autre de peur qu’ils ne soient pris par des hussards. Il me reste à vous parler de ma stabilité dans le ministère et de mon amour pour les Autrichiens, Je suis juste, et point amoureux, hélas ! Voyés l’injustice ; on croit à Vienne, et M. de Kaunitz en jurerait, que j’aime le roi de Prusse : c’est qu’en politique, quand on occupe une place, on ne doit ni aimer ni haïr ces gens-là, et, en vérité, si je nie laissais aller aux sentimens du cœur dans le cours des affaires, il serait assés simple que je donne la préférence à l’Impératrice sur Luc. Quant à la stabilité de mon ministère, vous savés ce que je pense sur cet objet, et combien j’y suis peu attaché ; je vois ma situation avec le plus grand sang-froid, mais je vous assure, quelle est aussi ferme que situation en ce genre puisse être, et que l’envie que Luc a de mon déplacement serait capable de m’attacher à une place que, par mon goût, je ne serais pas facile de quitter. Au reste, quelque chose qui m’arrive, à moins que Luc ne me fasse empoisonner, et n’envoyé ici quelques petits émissaires pour cet objet, comme il en a adressé un au bailli de Froulay il y a deux mois pour me tromper, soyés certain qu’avant la paix je ne sortirai pas de place ; et si lui et ses alliés veulent absolument continuer la guerre, nous nous donnerons le temps de voir sous mon ministère déployer ses ressorts de guerre et de politique dont il nous menace ; je vous déclare que je n’en ai pas de peur du tout, et que, si j’étais le maître de nos alliés, avant qu’il fût peu, M. Luc serait réduit à aller être général des troupes de la République de Venise.

« Tout ce que je vous mande vous paraîtra fort ; comme j’ai montré au Roi ce que vous m’avés envoyé de Luc, Sa Majesté ne sera pas fâchée que vous lui adressiés ma réponse. Qu’est-ce qu’il pourra vous en arriver ? Ne craignes pas que nous ne soyons pas assés fort pour vous préserver des fureurs de ce grand prince, et je, voudrais pour votre bien et voire tranquilité qu’il se fâchât sérieusement contre vous ; ainsi ayés du courage et envoyés lui copie de mon épître, qu’il connaisse le peu de cas que nous faisons de lui au phisique et au moral, et notre mépris pour ses plates injures.

« Ne vendes pas ce que vous avés dans les fonds publics, je me charge du soin de vos affaires ; si il y avait quelque chose à craindre, je vous avertirais à teins ; les effets sur le Roi valent