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est de toute équité au point de vue économique que les parties du territoire qui non seulement ne retireront aucun avantage du réseau navigable projeté, mais même souffriront de la diminution de leurs débouchés, reçoivent une compensation. Elle devrait leur être accordée au moment de l’exécution des travaux, et consister en une réduction des tarifs de chemins de fer pour les matières premières et les instrumens de production, de manière à permettre de diminuer le prix de revient des produits de ces régions. » Les compensations visées par cet amendement devaient se chiffrer, dans la pensée de son auteur, par une dépense égale à celle du projet lui-même, c’est-à-dire de 500 millions environ.

Malgré les efforts du ministre des Travaux publics, M. de Thielen, la Commission sembla de plus en plus disposée à entrer dans cette voie. Dès lors, un nouvel échec devenait inévitable ; le gouvernement le prévint en retirant le projet dans la séance du 3 mai 1901.

Il est difficile de prévoir ce qu’il adviendra finalement de cette lutte engagée à propos des canaux. Toutefois certaines circonstances survenues dans ces derniers temps sont de nature, sinon à modifier les intentions du gouvernement, tout au moins à ajourner leur réalisation. C’est d’abord la grosse question des nouveaux tarifs de douane, qui va occuper vraisemblablement le Parlement pendant toute la session prochaine ; c’est ensuite le programme d’augmentation de la flotte, qui sollicite l’attention du souverain et qui va grever lourdement le budget de l’Empire. D’autre part, la situation financière de l’Allemagne n’est plus de nature à encourager les projets coûteux ; les catastrophes qui se sont produites l’année dernière dans la banque et dans l’industrie ont eu leur contre-coup sur la richesse publique ; le revenu des chemins de fer, cette importante ressource du budget, est en voie de diminution. Une politique de prudence et d’économie s’impose donc, probablement pour longtemps, et cette situation est de nature à empêcher la réalisation du projet de canaux, en donnant plus de force aux graves objections d’ordre économique et financier qui ont été présentées contre lui.

Sans doute, la décision du Parlement est due en grande partie à l’attitude du parti agrarien, qui était opposé d’une manière irréductible au projet, et nous verrons tout à l’heure qu’il