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Page:Revue des Deux Mondes - 1902 - tome 7.djvu/695

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une idée incomplète ou fausse. On dit « fièvre intermittente, » mais celle-ci n’est qu’un symptôme, qui peut manquer, ou se retrouver dans d’autres maladies ; « fièvres à quinquina » indique l’efficacité d’un médicament qui est quelquefois, quoique rarement, mis en défaut ou qui a des succédanés, comme l’arsenic. D’autres fois, la dénomination est tirée de l’origine faussement attribuée au mal : celle de « fièvre tellurique » implique l’idée que le germe résiderait dans le sol humide ; celle de malaria, ou fièvre malarique, usitée dans toute l’Italie, correspond à la croyance qu’il existe dans l’air et qu’il est transporté par les vents.

Le nom de paludisme, lui-même, n’est pas sans défaut : il semble lier l’existence de la maladie à celle des marais, des eaux stagnantes et des marécages : il en est de même pour les mots de fièvre paludéenne, fièvre palustre, fièvre des marais, fièvre maremmatique. Mais cette idée même n’est pas tout à fait exacte. Tommasi-Crudeli, au congrès médical de Copenhague, en 1884, l’a abondamment réfutée. H a signalé bien des foyers, situés loin de tout marécage, sur des plateaux relativement élevés ou sur le versant des collines. On en comprend maintenant la raison. Les moustiques qui inoculent le mal à l’homme n’ont pas besoin de vastes étendues d’eau stagnante ; ils s’accommodent parfaitement de simples flaques sans profondeur. Ils prospèrent dans toutes les dépressions alternativement inondées et desséchées, parce que leurs larves y sont à l’abri des animaux carnassiers qui abondent toujours dans les collections aquatiques permanentes et profondes. L’eau qui croupit à ciel ouvert, dans les fossés, les ornières, les bassins de jardin, les tonneaux d’arrosage, les caniveaux engorgés, les gargouilles sans écoulement, leur fournit un milieu parfaitement approprié.

Le paludisme peut s’établir, pour cette raison, autour des habitations mal tenues où la décharge et l’écoulement des eaux ne sont plus assurées. Un sol humide, des flaques superficielles, lui valent mieux que de grands lacs. On conçoit que ces conditions soient réalisées, dans des climats relativement secs, en des localités où, par suite des travaux de l’homme ou des conditions géologiques, la surface du sol est peu perméable. Un bon observateur, Dood, qui a habité en Asie Mineure, sur le grand plateau qui sépare la Méditerranée de la Mer-Noire, nous en fournit un bon exemple : « L’altitude de Césarée, dit-il, est de