la Walkyrie à 320 000 pour la Dame de Montsoreau, — et le succès n’en dépend point. Mais, dans leur ensemble, les frais de mise en scène ont beaucoup augmenté : on peut s’en convaincre en les comparant, pour le même opéra, à deux dates différentes : la Juive revint à 150 000 francs en 1835 et à 190 000 francs dans la salle actuelle ; pour Faust, en 1869, il avait suffi de 118 000 fr. ; il fallut 187 000 francs pour le remonter après l’incendie.
Non que le détail des accessoires ait enchéri : le rouet et la chaise de Marguerite sont cotés 23 francs : la glace à main où elle se mire, 16 francs ; le coffret émaillé où reposent les bijoux tentateurs, 100 francs ; les cannes et les béquilles des vieillards de la kermesse, 32 francs ; l’épée mécanique, que doit briser le sortilège de Méphistophélès, et les fleurs articulées cueillies par Siebel dans le jardin du deuxième acte, ensemble 166 francs… Tout cela est assez modeste, mais la multiplication des surfaces de décor et des unités de costume suffit à grossir le total dans ce « grand » Opéra, dont le cadre effectivement est immense, avec les 1 300 personnes qui émargent à sa caisse et son massif monumental de 29 000 mètres cubes. L’entretien locatif absorbe 100 000 francs par an et le balayage à lui seul 35 000. Pour n’être pas écrasé très vite, sous le poids d’une machine aussi périlleuse, il faut au directeur une ingéniosité inlassable, une vigilance constante et la passion de son théâtre.
Aux Français, où le budget est de 2 millions par an, les frais matériels sont beaucoup moindres. On répare pour 10 000 francs, pour 11 000 on balaye. 100 000 francs de décors et 125 000 francs de costumes suffisent à toutes les exigences. Avec 35 000 francs, on rétribue la figuration, les comparses, qui tiennent ici peu de place ; mais les artistes, sociétaires et pensionnaires, reçoivent à divers titres une somme d’environ 800 000 francs.
Chanteurs de l’Opéra, comédiens des Français, « vedettes » des spectacles de drame ou de vaudeville, gagnans des bons numéros de la loterie dramatique, ceux-là ont tout : leur nom est connu, sinon célèbre ; leur rang honorable, leur labeur tempéré ; leur vie large et, pour quelques-uns, brillante. Mais ils sont peu. Sans sortir du département de la Seine, on rencontre la troupe du théâtre de banlieue, que promène, entre Saint-Cloud, Sceaux et Grenelle, un petit omnibus dans lequel elle répète ses rôles. Ici la besogne est énorme : en huit jours, une grande pièce est