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Pharaons, j’avais haie de revoir la Palestine. La terre des Pharaons est une nécropole, une terre morte. Celle du Christ, malgré sa désolation et sa tristesse, est une terre vivante. Elle garde les traces et le souvenir tout frais de Celui qui a conquis le monde, qui a créé notre civilisation morale et religieuse et qui fait vivre les Ames.

Mon émotion, en la revoyant, a été aussi forte qu’à mon premier voyage. J’ai baisé avec larmes le rocher où le Christ a été crucifié, la pierre où on l’embauma pour l’ensevelir, et celle dans le creux de laquelle son corps fut déposé. Je parcours tous les lieux où il a passé, j’entends sa voix, je sens sur moi sa main étendue et je revis avec Lui. L’Evangile entre dans ma conscience, et, tout en peignant en historien austère les scènes évangéliques, je laisse aller mon cœur et ma conscience à tous les sentimens divins qui m’inondent.

Je prie pour vous, cher ami, pour vous et les chers vôtres, dans ce voyage, et je demande à Celui qui seul nous sauve du mal qu’il vous fasse partager ma foi sans réserve. En dehors de Lui, il n’y a rien qui console, rien qui éclaire, rien qui fortifie. L’esprit, sans Lui, se trouble ; le cœur, sans Lui, s’égare et s’attriste ; la conscience, sans Lui, se lasse ; et le scepticisme nous dévore.

Je suis heureux des bonnes nouvelles que vous me donnez de votre femme et de vos filles.

Je serai à Jérusalem jusqu’à la fin de janvier J’irai passer huit jours à Bethléhem, afin de voir la nuit qui a vu naître le Christ. Puis, vers le 2 janvier, je ferai, au-delà du Jourdain et de la Mer-Morte, en plein pays bédouin, une longue excursion de quinze jours au moins. J’irai à Machœrons où fut décapité Jean-Baptiste, et à Djerasch, où le Christ, dit-on, a passé. Je reviendrai à Jérusalem vers le 22, j’y ferai une nouvelle halte de cinq ou six jours, et je partirai pour la Samarie et la Galilée.

Nous serons à Damas à la fin de février.

Adieu, cher ami, faites toutes mes amitiés à votre femme, dites à vos filles que je les bénis de loin, et, vous, croyez à mes plus tendres sentimens. Un bon souvenir à ce pauvre et cher M. de V…, qui monte le Calvaire, sans avoir besoin de venir jusqu’à Jérusalem.