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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 mars.


La situation présente, à l’intérieur, une certaine monotonie. Le temps parait long à mesure qu’on se rapproche des élections, et l’agonie de la Chambre continue d’être un spectacle fort peu édifiant. Ces malheureux députés, qui ont montré pendant près de trois ans une si grande complaisance à l’égard du ministère, et en ont été récompensés par un si grand nombre de recettes buralistes et de bureaux de tabac ; qu’ils ont distribués à leurs électeurs, se demandent avec effroi s’ils se seront par là suffisamment concilié leurs bonnes grâces, — et ils ne savent qu’en penser. Ils sont troublés, inquiets, énervés, et le désordre qui est dans leurs esprits se manifeste dans leurs actes : il en reste pour le spectateur une impression d’impuissance et de désordre tout à fait déconcertante.

C’est ainsi qu’un de ces derniers jours, la Chambre a été saisie de plusieurs propositions d’amnistie sur lesquelles elle a dû se prononcer. Il s’agissait d’abord des victimes de la Haute-Cour, qui ne lui inspirent, comme on sait, aucune tendresse ; mais, à propos de ces derniers, toute une procession d’autres condamnés a défilé devant elle, et pour chaque catégorie d’entre eux on lui a demandé le pardon et l’oubli. Pendant plusieurs heures elle a voté des amnisties, et encore des amnisties. Les débits de chasse et de pêche, les contraventions ou débits commis dans les contributions indirectes, ou dans les douanes, ou dans les mines, ou dans les bois, ont été amnistiés. La Chambre, en somme, n’a été impitoyable que pour les condamnés de la Haute-Cour et pour les cyclistes, rapprochement qui devrait donner à réfléchir à ces derniers en leur montrant combien ils sont impopulaires dans nos campagnes. Le gouvernement assistait à ce débordement de clémence sans pouvoir l’empêcher : on le voyait à