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à ménager d’une teinte à l’autre, dépendent de la nature de l’éclairage. Avant de se produire devant les feux des bougies, des lampes à huile ou à pétrole, l’acteur ne s’applique qu’une couche mince de fard, n’accentue pas beaucoup les accidens de sa face et évite les nuances intermédiaires au profil des couleurs fondamentales : rouge et blanc. Il convient déjà de forcer le maquillage en présence de l’éclairage au gaz, et enfin le comédien qui se produit en public derrière une batterie de lampes à incandescence doit accroître encore la couche de peinture, combiner de savantes dégradations à partir du rouge vif des pommettes, et ne se servir que de fards de première qualité[1].

En ce qui concerne le masque du comédien contemporain, on peut énumérer bien des effets à obtenir, citer bien des moyens d’exécution à appliquer, marquer bien des imperfections naturelles à corriger, mentionner bien des déformations à provoquer artificiellement, mais à défaut d’une fastidieuse classification technique de buts et de tours de main, il convient de mentionner comment on opère dans les deux cas extrêmes : celui de la femme et du jeune premier qui doivent avant tout s’embellir sans modifier profondément leur apparence naturelle, et celui du comédien obligé de se vieillir, de se transformer et de s’enlaidir.

« Examinez attentivement un portrait dû au pinceau de quelque grand maître et copiez-en l’aspect du mieux que vous pourrez. » Telle est la règle générale à poser dans la première des deux circonstances. L’artiste commence par se barbouiller la face avec du beurre de cacao de façon à n’en laisser sur la peau qu’une couche infiniment mince, mais uniforme ; puis il applique la teinte fondamentale : blanc (de zinc par exemple) en fard gras pour les comédiennes[2] blanc de zinc mêlé d’un soupçon de terre de Sienne et de rouge pour les jeunes acteurs (le mot jeune, bien entendu, s’applique à la nature du rôle et non à l’âge réel de l’interprète). La question du rouge aux joues, — c’est le technicien allemand qui parle, — importe beaucoup. Notre auteur suppose donc une actrice à visage ovale, à joues point trop grosses sur lesquelles les muscles se détachent eu légère saillie depuis le vomer jusqu’au confluent des

  1. Le critique musical d’un journal parisien très répandu nous a dit se rappeler parfaitement la réforme du maquillage qu’occasionna aux Variétés la substitution de l’éclairage électrique à l’ancien éclairage au gaz.
  2. Lorsque, bien entendu, elles n’incarnent pas Aïda, Sélika ou Carmen.