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contribuer à leur succès. — A sa suite, les écoles médicales professèrent que les phénomènes vitaux sont les effets immédiats d’une force sans analogues en dehors du corps vivant. — Cette conception régna, sans partage, jusqu’au temps de Bichat.

Après Bichat, le vitalisme de Barthez, plus ou moins modifié par les idées du célèbre anatomiste, a continué à dominer dans toutes les écoles de l’Europe jusque vers le milieu du XIXe siècle. Le fondateur de la physiologie en Allemagne, Jean Müller, admettait, vers 1833, l’existence d’une force vitale unique, « connaissant tous les secrets des forces de la physique et de la chimie, mais agissant en conflit continuel avec elles, comme cause et régulatrice suprême de tous les phénomènes. » Ce principe disparaissait dans la mort sans laisser de traces. — L’un des créateurs de la chimie biologique, Justus Liebig, mort en 1873, partageait ces mêmes idées. — Le célèbre botaniste Alphonse de Candolle, qui a vécu jusqu’en 1893, avait professé, au début de sa carrière, que la force vitale était l’une des quatre forces qui régissent la nature, les trois autres étant : l’attraction, l’affinité, la force intellectuelle. Flourens, en France, faisait du principe de la vie l’une des cinq propriétés ou forces qui résident dans le système nerveux. Un auteur contemporain, Dressel, en 1883, a essayé de remettre en honneur ce vitalisme un peu primitif, unitaire et efficient.


Une autre question s’était posée, entre temps, relativement à ce principe vital. Il s’agissait d’en préciser le siège : en un mot, de le situer dans l’organisme. Est-il répandu partout, ou bien réside-t-il en quelque point d’où il étendrait son action sur toutes les parties du corps ? Un savant célèbre de la fin du XVIe siècle, van Helmont, à la fois médecin et alchimiste, avait proposé une première solution, d’ailleurs fort bizarre. Le principe vital, selon lui, était logé dans l’estomac, ou mieux à l’orifice de sortie de cet organe, dans l’antre du pylore : il était le « portier de l’estomac. ».

L’idée hébraïque était plus raisonnable : la vie était liée au sang et se répandait avec lui par le moyen des veines dans l’organisme tout entier : elle s’écoulait des blessures en même temps que le liquide sanguin. Il faut voir là l’origine de l’interdiction, chez les Juifs, de faire usage de viandes qui ne seraient pas exsangues.

En 1748, un médecin nommé Lorry vit qu’une blessure très