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la Compagnie East London à Sunbury. Cette dernière, cependant, complète son volume, en cas de nécessité, par de l’eau tirée de la Lea.

L’emprunt fait à la vallée de la Lea est double. Il comprend des eaux prises dans le lit même de la rivière et le débit d’une source (Chadwell Spring) qui émerge à 1 600 mètres en aval d’Hertford. Cette source, voisine de la Lea, et trouble aussi souvent que cette rivière, n’est probablement qu’une sorte de dérivation naturelle, analogue à celle du Loiret : elle fournit environ 200 à 230 litres par seconde. Mélangées à celles de la Lea dans un même canal d’amenée, la New River, ces eaux sont un peu améliorées dans leur parcours par l’adjonction d’eau des puits artésiens forés par les Compagnies.

Cette provenance ne permet d’obtenir ni la composition chimique, ni la température moyenne qui font la supériorité des eaux de source dérivées pour Paris. Depuis quelques années pourtant, sauf les eaux extraites des puits forés à travers la craie jusqu’aux sables verts, qu’on distribue à part dans certains quartiers et qui sont naturellement limpides, toutes les eaux que consomme Londres ne sont plus envoyées dans la canalisation qu’après un filtrage, qui en améliore efficacement l’aspect s’il n’en modifie pas considérablement la qualité. Ces eaux sont assez analogues, quoiqu’un peu inférieures, à celles de la Seine ou de la Marne, que les Parisiens n’agréent plus pour leur consommation.

Les Anglais réduisent au minimum l’action des pouvoirs publics, et une exploitation unique, municipalisée, ne pouvait s’établir à Londres avec le fractionnement de la ville entre une quarantaine de pouvoirs locaux. On n’a sérieusement songé à centraliser que depuis 1890.

Les habitans de Londres ont toujours paru médiocrement se soucier de la pureté très relative de leurs eaux de consommation. Cela tient sans doute à ce qu’ils boivent en réalité très peu d’eau : la boisson habituelle de la grande masse est la bière ou le thé. La population riche, qui, chez elle, dans les grands hôtels ou dans les clubs, consomme du vin, semble d’avis, comme le poète latin, que Dieu y a mis d’avance toute l’eau qu’il faut : si d’aventure elle baptise son claret, elle n’use que d’eau soigneusement rafraîchie et préalablement clarifiée.

Belgrand demandait à un ingénieur anglais si l’eau de Londres