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est « la plus transcendante de toutes. » Elle est le procédé « sans lequel l’accumulation de toutes les autres ressources deviendrait presque toujours insuffisante et même illusoire. » Elle est aussi celui qui, parce qu’il s’inspire de la solidarité qui lie les générations des hommes, la fortifie conséquemment elle-même d’âge en âge. Et nous, parce que le procédé, n’a évidemment de fécondité que dans la mesure où ses résultats se précisent en jugemens de valeur ou en opinions critiques, c’est ce que nous avons voulu dire, en disant que le troisième caractère de la méthode positiviste était d’être « critique. »


III

Ne serions-nous pas après cela de grands sots, — c’est en vérité le seul mot qui convienne, — si, parce qu’Auguste Comte a fait de sa méthode quelques applications qui nous paraissent fausses, nous étions systématiquement en défiance de cette méthode même ? En réalité, comme indication générale de la marche à suivre par l’esprit humain dans la recherche de la vérité, sa méthode, objective, évolutive et critique, n’a les défauts ni de la méthode subjective, qui confond perpétuellement les conditions des faits avec celles de notre mentalité, ni ceux de la méthode empirique, dont le principal est de poser qu’à tout moment de la durée, ce que nous pouvons savoir, nous le savons d’une science certaine et indéfectible. Elle a cet autre et grand avantage de couper court aux questions inutiles : Utrum chimæra bombinans, etc., quelle abandonne aux méditations des curieux ou plutôt des oisifs. Elle a dans sa définition de quoi se corriger elle-même. Et, pour ces motifs, si les conclusions où elle a conduit Comte nous paraissaient inacceptables, cela ne prouverait rien contre elle, mais seulement contre Comte. J’ose d’ailleurs ajouter que, des conclusions du positivisme, il y en a quelques-unes au moins de dignes d’être retenues, et c’est ce qu’il me reste à montrer maintenant.

« Nul n’a mieux apprécié que moi le principal danger des utopies actuelles, qui, rétrogradant vers le type antique par une sotte ardeur de progrès, s’accordent à prescrire au cœur humain de s’élever, sans aucune transition, de sa personnalité primitive à une bienveillance directement universelle, dès lors dégénérée eu une vague et stérile philanthropie, trop souvent perturbatrice. »